Pierre Buraglio, Simon Hantaï, Kacha Legrand, Florindo Nanni, Michel Parmentier, Adrien Vescovi
(im)matériel
L’exposition «(im)matériel» réunit des œuvres qui se jouent des propriétés des matériaux, de leur densité ou de leur fragilité (le tissu, le calque, le papier kraft, le papier cristal, les enveloppes récupérées) en révélant l’espace pictural par de simples gestes:le pli et le dépli, la juxtaposition, l’assemblage ou la décoloration.
Cette combinaison de procédés et de matériaux est au cœur de la réflexion de nombres d’artistes depuis les mouvements artistiques français des années 1960 comme Supports-Surfaces ou BMPT. Ces préoccupations sont aujourd’hui reconsidérées.
L’œuvre de Simon Hantaï (1922-2008), dans son ensemble est, en ce sens, séminale. Elle questionne et propose à la fois nombre de solutions picturales, à commencer par le pli et le dépli: «Quelque chose est arrivé par et en la peinture — ligne, forme, couleur réunies en un seul geste» (Simon Hantaï cité par Hubert Damisch, in Rencontres en champ/contrechamp. La peinture en mal d’explic(it)ation, catalogue de l’exposition «Simon Hantaï – François Rouan. Conversation», éditions Galerie Jean Fournier, Paris). Matisse aura ouvert la voie avec les papiers découpés dès les années 1940 en combinant en un seul geste la peinture, le dessin et la sculpture.
(im)matériel présente un Blanc de Simon Hantaï où le pliage régulier fait vibrer la couleur et le blanc de la toile. Aux côtés de cette œuvre, diaphane et grave à la fois, un calque de Michel Parmentier (1938-2000), d’une grande sobriété, combine l’opacité à la transparence. Pierre Buraglio (né en 1939) réactive une installation d’enveloppes dépliées, épinglées et alignées au mur déjà réalisée à la galerie en 1978 et au Mnam pour l’exposition «Murs» en 1981. Les enveloppes ouvertes laissent apparaître le bleu du papier intérieur. Les formes colorées obtenues par le dépliage et la déchirure sont rythmées par la répétition du geste radical. Cet espace bleu, tellement matissien, est voué à disparaître durant le temps de son exposition à la lumière. Ainsi, Pierre Buraglio matérialise un espace coloré éphémère tandis que Simon Hantaï le fixe dans le temps.
Florindo Nanni (né en 1952), Kacha Legrand (née en 1960) et Adrien Vescovi (né en 1981), s’inscrivent différemment à la suite de ces démarches et portent chacun une attention toute particulière à la couleur. Par décalage, par écart, ou encore par juxtaposition, l’espace coloré se concrétise et se densifie. Pour obtenir cette «palpable transparence», Florindo Nanni utilise un calque épais et de la peinture à la cire posée au chiffon dans une série de travaux récents. La translucidité du matériau, associée au velouté de la technique, semble lester la couleur.
Kacha Legrand, dans une série inédite des années 1980, a recours à l’assemblage de papiers de différentes épaisseurs et textures qu’elle peint. Ces collages, une fois épinglés, font corps avec le mur. Adrien Vescovi, quant à lui, réalise des tableaux monochromes à partir de tissus teintés et tendus sur châssis. Exposés au soleil et altérant ainsi la couleur, ces tissus, retendus sur des châssis plus grands, révèlent les marques de décoloration. Les effets colorés ainsi obtenus, comme le geste de pliage chez Simon Hantaï, construisent l’espace même du tableau.
L’exposition (im)matériel est conçue sous la forme d’une conversation entre des œuvres d’artistes tutélaires comme Simon Hantaï, Michel Parmentier ou Pierre Buraglio et d’autres artistes qui continuent de questionner le tableau aujourd’hui ou comment transcender les matériaux pour qu’advienne l’immatériel de la peinture.
Vernissage
Jeudi 4 décembre 2014 à 18h