Jean François Fourtou
Il était une fois
Jean-François Fourtou développe son travail un peu comme il écrirait un roman initiatique, dont chaque nouveau chapitre s’ouvrirait sur une exposition. À la fois auteur et personnage de son oeuvre, il effleure souvent l’autobiographie tout en la dépassant; il offre aux héros de ses œuvres quelques épisodes extra-ordinaires, en guise d’épreuves; et surtout il s’adresse, en priorité, à qui se regarde encore grandir avec presque étonnement. Bref, tout se passe comme dans un roman d’apprentissage, qui serait tissé d’innombrables «il était une fois»: chaque proposition peut sembler naïve, de prime abord, mais elle s’avère vite bien plus troublante que ne le laissaient penser les premiers mots (il en est toujours ainsi dans les contes, non?).
Si le motif de l’enfance dessine le filigrane de la plupart de ses œuvres, Jean-François Fourtou ne cherche pas à développer une métaphore de l’artiste comme grand gamin, pas plus qu’à initier chez le spectateur une quelconque régression. En se jouant de simplicité et de réminiscences, son œuvre cherche plutôt à provoquer un trouble de notre présent.
L’artiste entame aujourd’hui comme un nouveau tome de son œuvre, où différentes écritures se mêlent, et différents médias: nouveau chapitre, sa prochaine exposition personnelle à la galerie Georges-Philippe & Nathalie Vallois commence, comme il se doit, par un…Il était une fois…La maison d’un géant. Un ensemble irréel, où l’on est invité à entrer comme par effraction. Tout dans la pièce, est devenu disproportionné ; cet ensemble de meubles, table, chaises, lit, d’abord imaginé pour la Verrière-Hermès à Bruxelles (lors d’une exposition présentée fin 2003) est l’occasion de provoquer un petit trou noir dans notre conscience adulte. Jeux d’échelles, d’incongruités, de déséquilibre, dans un mille-feuille de temps… On retrouve là les motifs qui hantent ce travail, à commencer par celui de la cabane d’enfant, un abri où refaire l’expérience de jeux oubliés.
Et pour déconcerter un peu plus notre ferme conscience, des singes ont tout envahi! Succédant aux moutons, oies, chiens et dromadaires, ces sculptures d’orangs-outangs incroyablement réalistes et presque vivantes parasitent à la fois l’espace de la galerie mais aussi toute une série de photographies, lieux intimes ou officiels, environnements familiers et affectifs de l’artiste. À Madrid: un bar, un boucher, des ferrailleurs. À Paris: la bibliothèque de l’Institut de France, l’Ecole des Beaux-Arts, un appartement Haussmanien. Chaque monde semble invisible à l’autre, chacun cotoît ces étranges créatures comme si elles faisaient partie intégrante de leur vie, comme le rêve capricieux d’un enfant infiltré dans un monde adulte.
… Au même moment, un autre animal, cher au bestiaire de Jean-François Fourtou, une girafe grandeur nature, essaye de se frayer un passage entre les murs de la galerie Pièce Unique.
Emmanuelle Lequeux
Article sur l’exposition
Nous vous incitons à lire l’article rédigé par Géraldine Bloch sur cette exposition en cliquant sur le lien ci-dessous.
critique
Jean-François Fourtou