Jean-Daniel Berclaz, Christian Boltanski, Philippe Clerc, Claude Closky, documentation céline duval, Herman De Vries, Gabriele Di Matteo, Ernest T., Hans Peter Feldmann, Ewerdt Hilgemann, Hippolyte Hentgen, Bernard Lassus, Sol LeWitt, Richard Long, Lilly Lulay, Gilles Mahé, Christian Marclay, Laurent Malone et Dennis Adams, Roberto Martinez, Annette Messager, Jonathan Monk, Maurizio Nannucci, Deimantas Narkevicius, Dennis Oppenheim, Pierre Paulin, Gilles Picouet, Joan Rabascall, Ramon, Pierre-Lin Renié, Jean-Jacques Rullier, Matthieu Saladin, Dorothée Selz, Nicolas Simarik, Eric Tabuchi, Taroop & Glabel, Marijke Van Warmerdam, Eric Watier, Robin Waart, Alun Williams, Luuk Wilmering
Iconographie. L’œuvre comme collection
Le développement de 1925 à 1929 de l’Atlas Mnémosyne par l’historien d’art Aby Warburg est considéré comme une nouvelle méthode de recherche et d’analyse en histoire de l’art à partir du montage d’images sans aucun commentaire. Lorsqu’il passe à l’Ouest en 1961, Gerhard Richter débute l’Atlas, une collection d’images photographiques d’abord familiales, puis publicitaires ou d’actualité, qui seront les sources de ses peintures hyperréalistes. Rappelons que le couple de photographes allemands Bernd & Hilla Becher commence sa collection photographique de typologies d’architectures industrielles à partir de 1958, et que le travail de Christian Boltanski, notamment basé sur l’archéologie de sa mémoire d’enfant, puis des albums de photos de famille, de classe, débute à la fin des années soixante.
La présence de plusieurs œuvres de Joan Rabascall précise son acuité dans l’analyse des mass-média et l’envergure de sa recherche sur le statut de l’œuvre d’art. Une sérigraphie de Ramon témoigne de son goût pour le cinéma d’avant-garde russe. Une vaste salle est consacrée à Hans-Peter Feldmann. Depuis les années soixante, l’artiste s’attache à la collection d’images de toute nature pour «essayer de classer les rêves en catégories». La présence d’Ernest T. et de ses alter-ego Taroop & Glabel montre également que l’observation du milieu de l’art peut être une source d’inspiration. Le dialogue entre Feldmann et Ernest T. s’intensifie dans l’exposition. Il a débuté en 2001 par le catalogue d’exposition «Jean-Pierre Magazine» et trouve ici, dans les liens entre les œuvres, de singuliers rebondissements.
La collection complète des magazines «Gratuits» édités par Gilles Mahé entre 1979 et 1994 est intégralement présentée. En plus de poser de façon explicite la question de la diffusion, elle montre également la prédilection qu’avait l’artiste pour les réalisations collectives, son sens de la négociation et du dialogue. Une très belle série de dessins aux crayons de couleurs, «Le bonheur illustré», réalisée par Annette Messager côtoie plusieurs œuvres de Dorothée Selz qui s’appuient sur des images préexistantes «augmentées» par des rehauts de matière colorée.
La génération suivante, née à la fin des années 1950, a parfois été influencée par les pratiques de ces artistes. Ainsi, on sait que Jean-Jacques Rullier a suivi l’enseignement de Boltanski qui lui a transmis son goût pour les livres. Le parcours de Claude Closky est également très prolifique et semble pousser la question de l’œuvre (et son contraire, le désœuvrement) jusqu’aux limites de l’absurde.
La présence d’une troisième génération est esquissée dans l’exposition par la présence d’œuvres de documentation Céline Duval et d’Hippolyte Hentgen. La jeune normande a choisi un nom d’artiste qui la positionne dans un domaine précis, celui de la documentation (et donc de l’iconographie). Les deux petits dessins aux crayons de couleurs faits à quatre mains par le duo Hippolyte Hentgen aborde le thème de la collection d’images sous l’angle de l’intérieur bourgeois du collectionneur qui, aux yeux des deux jeunes artistes délurées, a l’air d’un monstre extra-terrestre tout à fait improbable.
Yannick Miloux, octobre 2015