I Games

I Games. Troublante femme-enfant qui hante l’obscurité de la grande salle du centre d’art, I a toutes les apparences, corps et visages lisses, de l’artiste, un peu guindée dans sa robe du dimanche, chaussettes blanches et sandales rouges. Fantasmagorie entêtante, I se déploie au sol, aux murs, en des hauteurs et des échelles variées qui ont l’incohérence du rêve.

Dans ce théâtre d’ombres, que seules ses apparitions blafardes éclairent d’une pâle lueur, I se livre aux jeux communs de l’enfance : I se balance, saute à la corde, et toujours se dédouble (effets de miroir, superposition d’images, ou ralenti saccadé de la vidéo). Dans des mouvements-tensions, d’attraction-répulsion, d’inspiration-expiration, d’effacement-recouvrement, I jouit, impavide et diaphane, d’un univers clos, et sans altérité.
Étrange malaise mêlé de plaisir, que souligne discrètement une double bande son, aléatoire et énigmatique. On y discerne bien le crissement de la craie qui trace la marelle au sol, le grincement têtu de la balançoire, mais d’autres bruits, chocs, souffles, moins identifiables, s’y substituent, dissonent, ou coïncident miraculeusement avec les images. Chaque fois différemment, puisque toutes les bandes, son et vidéo, tournent en boucle, dans des temporalités parallèles mais déconnectées.

I Games, une installation envoûtante, qui exploite avec subtilité les potentialités de la projection vidéo pour produire un espace fictionnel mouvant, aussi incertain que le souvenir, le rêve ou le fantasme, celui terrifiant d’une enfance éternelle, immobile et sans affect.

Maïder Fortuné
— I Games, 2001. Installation vidéo, 5 bandes.
— Totem. Vidéo, 10’03.
— Hide and Seek. Vidéo, 11’35.
— Puppet. Vidéo sur moniteur, 4’45.
— Aletsi. Vidéo, 6’.
— Hopscotch. Vidéo, 4’16.

Conception son : Cédric Pigeot.