Georgina Starr
I am a record and I am the medium
Les formes d’édition qui traversent l’oeuvre de Georgina Starr, le vinyle, les livres en série limitée et fabriqués maison composent des installations paradoxalement domestiques et froides, brutes et précieuses, scientifiques et pop. L’utilisation du noir et blanc, l’évocation et la superposition d’images de sa mère, d’une actrice disparue du cinéma muet et de ses propres interprétations dégagent un sentiment d’intimité partagée, mêlé de nostalgie.
Cette première monographie en France se construit autour de l’installation I am a Record: un ensemble d’enregistrements, pressages uniques vinyles accompagnés d’une pochette peinte ou dessinée par l’artiste. Des documents d’archives épars, recueillis sur plus de vingt ans, révèlent une autobiographie lacunaire et dessinent l’environnement de cette Young British Artist atypique.
Le travail présenté recouvre tout ce que Georgina Starr a enregistré depuis l’âge de cinq ans, depuis le grondement d’un radiateur cassé qu’elle imagine lui délivrer un message, le réenregistrement d’une conversation avec un étranger, de voix chantées, d’une conversation télépathique par téléphone, d’un dîner de famille, d’une collection de sifflements, de messages de l’au-delà d’amis disparus, de lettres d’amour via des enregistrements de musique métal jusqu’à sa propre collection de disques en feu.
Ces investigations récentes l’ont mené à s’intéresser à une actrice oubliée du cinéma muet: Theda Bara. En 1918, l’actrice était une star, au même titre que Charlie Chaplin et Mary Pickford. Entre 1915 et 1920, Theda Bara a tourné plus de quarante films et interprété une quantité astronomique de rôles. Elle collectionne les caractères excentriques, tour à tour reines, princesses, vampires ou vagabondes et occupe chaque plan de ses films de toutes les gammes d’expression du sentiment humain.
Elle a également joué un rôle important dans l’industrie William Fox Film Studio façonne la jeune actrice pétillante et excentrique et lui construit une biographie enchanteresse. Tout le monde se l’arrache, mais bien vite, la répétition systématique des rôles et l’ennui la feront sombrer inexorablement. Sur les quarante films de cette époque, il n’en reste que deux, les autres ont disparu par négligence ou dans les nombreux incendies qui ont décimé ce patrimoine cinématographique.
A partir de synopsis des films, de notes, de critiques, de photographies, l’artiste reconstitue les décors et réinterprète certaines scènes des films disparus, pour les présenter ensuite sous forme de ciné-concert ou de cinéma d’exposition. Les vêtements, décors, vidéos et mobilier sont réunis dans une installation exclusive pour l’exposition.
Georgina Starr affectionne la communication avec les esprits. Elle consulte régulièrement des médiums et enregistre chaque rendez-vous. Pour l’oeuvre I am the Medium, elle choisit de produire un disque regroupant des échantillons de ces enregistrements sous forme de sillons fermés. Le sillon fermé ou locked groove est un processus de gravure des disques vinyles qui permet de faire tourner en boucle un peu moins de deux secondes de son. L’édition regroupe deux cent cinquante boucles issues de ces séances de spiritisme.
L’exposition souhaite mettre en lumière les préoccupations récentes de l’artiste par la présentation d’une performance et d’une installation produite spécifiquement autour d’une mise en perspective de ses enregistrements et de ses recherches ésotériques. La redécouverte d’une artiste que l’on croyait connaître et que l’on pensait avoir oubliée.