Communiqué de presse
Théo Mercier
Hunted Haunted / Bête et sauvage
Fidèle à sa politique d’ouverture à l’art contemporain qui permet de présenter ce que le rapport de l’homme à la nature inspire aux créateurs de notre temps, le Musée de la chasse et de la nature invite un jeune artiste. Avec «Hunted Haunted / Bête et sauvage», Théo Mercier réalise sa première exposition muséale pour laquelle il a reçu le prix Paris Jeunes talents – catégorie Arts visuels décerné par la Ville de Paris.
Découvrez le triste état de Dame Nature, sa destinée et son futur, sa gloire et sa déconfiture. Entrouvrez le rideau, laissez le noir toucher vos peaux et soupirez d’aise. Tout a été préparé pour votre venue, prenez place et soignez votre tenue. Le vert est mis. Ne le dites à personne, gardez ce secret bien en vous: l’écologie est une femme à barbe et c’est dans ce musée qu’elle vit.
De ses voyages en Naturie, Théo Mercier a rapporté des trésors à visages multiples, des créatures inédites, des cosmogonies surnaturelles et primales qu’il nous invite à (re)découvrir. Car «Hunted Haunted / Bête et sauvage» est avant tout une invitation: un voyage à pas lents dans une mystérieuse galerie familière mais étrangère, un déjà -vu confondant, une inquiétante étrangeté, des paysages et des êtres entre réel humain et fantasme animal.
Et, comme la mise en scène nous le suggère, ici le regard prévaut: le regard triple d’un éléphant grandeur nature, les yeux bleus de mutants génétiquement modifiés par l’Homme, tout nous pose question et les rôles s’inversent dans cette contemplation abîmée: nature rêvée ou nature enfouie ? Avenir prophétisé ou passé ressuscité ? Qui est bourreau et qui est victime ? Qui est chasseur et qui est gibier ? Est-on là pour sourire et s’amuser ou pour trembler et se faire dévorer ? Doit-on sauver ces êtres informes ou abréger leurs souffrances ?
Les questions affluent dans ce face à face qui nous rappelle cette tragédie: la nature modifiée par l’humain devient humaine. Trop humaine pour être honnête. Mais quelles que soient les réponses à ces questions, les cabinets de curiosités de Théo Mercier continuent de parcourir avec légèreté et gerbes de couleurs les continents, les éléments, les sens et les matières.
Cinq installations plongées dans l’obscurité pour mieux en percevoir l’essentiel et la violence, la phosphorescence des sérigraphies qui nous saute au visage, un parcours qui invite au merveilleux; le parti-pris est résolument de réveiller le visiteur après l’avoir hypnotisé. Car nos yeux sont fatigués, nos yeux croient connaître le vert et la terre, les arbres et les animaux, les vents et les océans. En vérité nous ne voyons plus rien depuis longtemps et nous laissons fondre les glaciers en pleurant.
Alors Théo Mercier décide de donner un coup de pied dans la fourmilière, d’appuyer sur les points sensibles et de nous interroger sur l’état sauvage des choses, sur la place que nous laissons à nos origines, sur la place que nous ne leur laissons plus. Pas de morale dans cette histoire, la chose doit être festive et le mélange de rigueur. Voilà pourquoi la rencontre improbable et pourtant évidente du vivace et de l’inerte est au coeur du travail présenté aujourd’hui au musée par ce jeune artiste à la très large palette: sculpture, peinture, photographie, collage, sérigraphie, tout est mis en oeuvre pour orchestrer une célébration de la Nature dans tous ses états, pour délivrer les prophéties des déités et transmettre les tabous cachés des totems.
Éveiller les foules et les hypnotiser, en mettre plein les yeux pour essayer de changer un peu les regards portés, cela s’appelle un enchantement, un sortilège. C’est assez normal car cet homme est un peu sorcier. Comme nous tous. Comme Dame Nature.