Jean-Olivier Hucleux
Jean-Olivier Hucleux
« J’essaie de comprendre ce qui se passe. De comprendre comment opère ma mémoire. Mais c’est à peu près impossible, ça m’échappe, je n’y arrive pas. La cartographie d’une mémoire oubliée, voilà ce que je dessine ».
Jean-Olivier Hucleux s’est rendu célèbre par sa pratique hyperréaliste des Cimetières et plus tard, par celle des Portraits réalisés à la mine de plomb d’après photographie.
On admira sa virtuosité technique, qui poussait la ressemblance aux modèles jusqu’à la perfection formelle, au-delà de la mécanique photographique elle-même. C’est pourtant le processus-même de la genèse artistique qu’il faut considérer de plus près: la patience et la persévérance dans le temps long de la création. Ils sont les corollaires d’une attention portée au détail et jusqu’à l’élément fondamental, le point.
Ces multiples dimensions du procédé Hucleux, on les retrouve dans les Dessins Numériques. Depuis 2000, l’artiste compose avec son fils Jean-Louis des cartes illisibles, à l’aide de programmes graphiques. Chaque jour, des heures durant, l’ordinateur et la main alternent dans une confrontation de leurs mémoires respectives.
Les trames qu’ils tissent sont constituées de petits carrés noirs ou gris plus ou moins sombres, et dont la lecture ne devient possible que lorsqu’on s’en écarte pour laisser entrevoir, parfois, des figures humaines. L’exposition de la Galerie Municipale présente l’un des célèbres portraits de l’artiste, le Portrait de Francis Bacon, ainsi qu’une quinzaine de Dessins Numériques réalisés entre 2000 et 2005.
Elle sera l’occasion de confronter des travaux issus de périodes différentes, et de comprendre comment les Dessins Numériques opèrent la synthèse de toute une pratique artistique. Outre la rigueur, c’est en effet le hasard poussé des Déprogrammations qu’on y retrouve. Deux dimensions intrinsèques à l’oeuvre d’Hucleux qui tournent ici à la lutte, pour exprimer l’immatériel ou la présence, sans doute celle de la mémoire oubliée, celle de ces silhouettes portraiturées qui se seraient glissé dans les interstices possibles de la machine.
A l’instantané du déclic photographique, Hucleux oppose le règne de la lenteur. Durant des mois, chaque grain de la mine de plomb met au jour l’organisation de la matière dans l’infiniment petit. Ce faisant, le dessin s’affranchit de l’image référentielle ; Hucleux « réduit en cendre » les coagulations imparfaites du cliché photographique, les cristallise ensuite, de nouveau, en un foisonnement de marquages microscopiques – points, lignes et autres signes graphiques d’un éventail illimité.
L’acte de dessiner se ritualise, se détermine en un ensemble de règles invariables, de programmes codifiés dont l’excès est à la mesure de l’objectif fixé : aller au-delà de la saisie photographique, donner à voir plus. « Souvent, je dis que je peux aller plus loin, cela fait sourire, on pense que je raconte des histoires…
En fait, on devrait toujours [aller plus loin] mais alors on ne ferait qu’une peinture dans sa vie, et encore, elle serait en cours ». La mine de plomb s’immerge plus profondément dans la matière que ne la révèle le médium photographique, mais encore, en un acte quasi chirurgical, semble à même de délivrer par la matière l’esprit qui s’y trouve enfermé.
Sur le papier et la toile, Hucleux met à nu les formations les plus primitives de son inconscient, libère le flux de son expression psychique en un flot de formes venues du plus profond. Ludovic Lalauze (extraits du texte du catalogue de l’exposition)
Vernissage
Samedi 14 mars 2009 Ã 18h.
Evénement
Dimanche 5 avril à 17h. Entrée libre
Rencontre avec Jean-Olivier Hucleux.