Ali Kazma
How to film a poet?
Ali Kazma aura filmé le maître horloger, le taxidermiste, le neurochirurgien, le peintre — et, référence particulière à l’Espace Topographie de l’art qui fut un jour un lieu industriel du textile, la fabrication des vêtements, du fil au défilé — avec la même attention passionnée, une attention «à la fois archéologique et poétique». Archéologique de par la volonté d’exactitude de l’artiste et la précision extrême avec laquelle le vidéaste filme les gestes liés au travail. Poétique de par l’esthétique pensive des images et de la construction consciente d’un monde où l’homme se réalise dans son activité — qui devient dès lors, au sens même de Hannah Arendt, une action.
L’une des dernières productions de Ali Kazma se distingue des Obstructions: alors que dans cette grande série de vidéos, les hommes au travail sont toujours représentés dans leur univers propre, Clerk (première vision en France) est filmé en studio. L’artiste s’intéresse ici davantage à la main, cette main qui tamponne des documents avec une célérité telle qu’elle en semble devenir indépendante de l’homme lui-même, au profit de l’institution bureaucratique qu’elle sert.
L’exposition présentée à l’Espace Topographie de l’art est intitulée par une question: «Comment filmer un poète?» Ali Kazma, en fervent amant du livre et des cultures, se pose cette question cruciale pour lui depuis bien longtemps. Cette grande exposition (dix vidéos présentées en simultané), de par la poésie conjuguée du lieu et des oeuvres, contient en elle-même plusieurs éléments de réponse.