ÉCHOS
08 Nov 2010

Houellebecq, le Goncourt et l’art contemporain

PElisa Fedeli
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Michel Houellebecq est le vainqueur du Prix Goncourt 2010 pour son dernier roman, La carte et le territoire. Comment l’écrivain se représente-t-il l’art contemporain dans son œuvre de fiction?

Michel Houellebecq vient d’être couronné du Prix Goncourt 2010 pour son nouveau roman La carte et le territoire, déjà vendu à plus de 150 000 exemplaires. Après Les particules élémentaires (1998), Plateforme (2001), La possibilité d’une île (2005) et trois tentatives échouées, il l’emporte cette fois, largement en tête devant Virginie Despentes.

Comme dans les derniers romans de cette rentrée littéraire (Don De Lillo, Marie Nimier, Pauline Klein), le milieu de l’art contemporain sert de décor et surtout de révélateur, quant aux travers de notre époque.

Le personnage principal du roman de Houellebecq est un jeune artiste parisien prénommé Jed Martin, dont on suit l’ascension depuis l’école des Beaux-Arts jusqu’au sommet de la gloire. Il commence par expérimenter la photographie avec un vieil appareil, développant un style objectif et typologique. Comme il a étudié la géographie, les cartes Michelin deviennent ses sources de prédilection, ce que la grande entreprise ne manquera pas de remarquer! Sponsorisé par la marque Michelin, il peut alors entamer une carrière. Celle-ci sera ponctuée de vernissages où Jed croise de jolies russes élancées, des attachés de presse névrosés ainsi que des stars de la télévision. Il atteindra définitivement le succès, une fois retourné à la peinture. Spécialisé dans le portrait hyperréaliste, il représente des individus dans l’exercice de leur métier, dont «Damien Hirst et Jeff Koons se partageant le marché de l’art».

Le regard que pose Houellebecq sur l’art contemporain est désenchanté. Il le peuple de ses thèmes récurrents: l’inauthenticité, la désillusion, le carriérisme, en somme la médiocrité humaine. Il n’en retient que les mécanismes de marché. Jamais il n’évoque la passion artistique ni la recherche esthétique. L’artiste qu’il décrit n’est qu’un type ordinaire, chanceux malgré lui, qui ne doit sa carrière qu’à un galeriste au bras long.

Ce portrait caricatural a le défaut de ne pas être drôle. Moins provocateur que d’habitude, le ton de Houellebecq devient parfois ennuyant. A l’exception de ce passage irrévérencieux:
«Picasso, c’est laid, il peint un monde hideusement déformé parce que son âme est hideuse (…) il n’a rien à apporter, il n’y a chez lui aucune lumière, aucune innovation dans l’organisation des couleurs ou des formes, (…) rien qui mérite d’être signalé, juste une stupidité extrême et un barbouillage priapique qui peut séduire certaines sexagénaires au compte en banque élevé» (p. 176).

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