ART | EXPO

Hidden

06 Fév - 07 Mar 2009
Vernissage le 05 Fév 2009

Les photographies d’Alain Declercq ont été "volées" sur des zones interdites après les attentats du 11 septembre, au moyen d’une camera obscura de fortune. Il en résulte des images floues, des cadres imprécis, une lumière manquante due à des temps de pause hasardeux.

Communiqué de presse
Alain Declercq
Hidden

Pour l’exposition personnelle que lui consacre la galerie, Alain Declercq montre Hidden Camera obscura, une nouvelle série de photographies prise à New York au cours de l’année 2008. Ce quadrillage photographique de Manhattan recense environ 70 lieux que personne n’est autorisé à photographier.

Considérés comme « sensibles » depuis les attentats du 11 septembre, les prisons, les commissariats ou encore les tunnels et les ponts sont censés échapper à toute reproduction. Pour réaliser ces images interdites, Alain Declercq construit lui même son outil de prise de vue, une camera obscura constituée d’un simple boîtier en plastique, dans lequel un minuscule trou percé fait office de diaphragme. L’artiste découpe ensuite la pellicule qu’il dispose au fond du boîtier. Cette chambre noire low tech est posée directement au sol, le temps qu’un négatif s’imprime.

Les photographies ne cachent pas les imperfections du système de prise de vue : images floues, cadres imprécis, lumière manquante due à des temps de pause hasardeux, soulignent une technique hautement artisanale.

Pourtant, avec des moyens d’une grande simplicité, Alain Declercq produit une brèche dans la législation, et vole méthodiquement ce qui devrait être soustrait aux regards, au coeur même de l’espace public.

Appareils de contrôle et systèmes de répression, manipulation, désinformation, tels sont les sujets qui guident le travail d’Alain Declercq, passionné par tout ce qui touche de près ou de loin aux logiques sécuritaires à tendance paranoïaque, aux politiques de la peur version « hystérie collective » ou à toute forme de théorie du complot.

Il ne tente pas de savoir à qui profite le crime, mais il met à jour les méthodes permettant de biaiser le réel et de brouiller les ondes. Pour cela, il devient lui-même brouilleur, mais toujours l’air de rien, plus proche de l’anti-héros que du militant agitateur et charismatique. « Homme de l’ombre », « acteur invisible » sont les termes qu’il utilise pour décrire son double positif, Mike, personnage principal de la vidéo éponyme, docu-fiction post-11 septembre retraçant le parcours d’un supposé agent secret entre Le Caire, Washington, Paris et Amsterdam.

Sans être ouvertement dénonciateur, Alain Declercq utilise les outils de ceux sur lesquels porte sa critique. Deux méthodes s’imposent : l’infiltration ou la surexposition. Dans Welcome home Boss (2001), il éclaire violemment à la nuit tombée les maisons des dignitaires de Montréal. Ailleurs, il se poste devant un radar avec un panneau afin d’avertir du dispositif de contrôle.

Dans d’autres cas, il mime et infiltre : par exemple en proposant aux visiteurs du Centre d’art de Brétigny-sur-Orge (2000) d’utiliser une voiture de police, en filmant à leur insu des militaires dans la vidéo État de siège (2001) ou en reproduisant un missile de croisière à l’effigie de la compagnie American Airlines. En se glissant dans la peau du journaliste d’investigation, du flic ou de l’agent secret, l’artiste déjoue de l’intérieur les systèmes de pouvoir et les discours dominants. Avec l’interview du commandant Pierre-Henri Bunel, il propose une analyse dissonante et minutieuse de l’attentat du Pentagone et éclaire d’un jour nouveau un événement devenu illisible à force de surexposition.

Les cibles d’Alain Declercq sont autant les appareils répressifs et violents que les appareils idéologiques, qu’il aborde avec les moyens de la fiction. La perquisition par la police judiciaire dans l’appartement de l’artiste à Bordeaux distillera de manière troublante, et en miroir, la fiction dans le réel. Les fausses armes, les billets d’avion, les coupures de journaux sur les attentats du 11 septembre, rassemblés pour le tournage de Mike (2005), conduisent la brigade anti-terroriste à interroger Alain Declercq sur l’existence de ce mystérieux personnage.

Face au conditionnement des corps et des esprits, l’artiste propose des outils pour se réapproprier un réel dilaté et incompréhensible : « Ce qui m’intéresse, c’est la possibilité qu’une oeuvre puisse être activée par d’autres. En somme, de proposer des outils au spectateur qui devient un usager potentiel. Par exemple quand je réponds à des lettres manuscrites en imitant l’écriture de mon interlocuteur grâce à un logiciel informatique (Faux en écriture, 1997-2004), l’oeuvre peut faire figure de mode d’emploi. » Ni agitation, ni propagande, le travail d’Alain Declercq choisit le mode du décryptage et de l’enquête, en reproduisant et en documentant des outils de pouvoir afin de nous redonner prise sur ceux-ci.

Vernissage
Jeudi 5 février à partir de 18h.

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