Charles Mason
Hanging together
Charles Mason laisse volontairement aux matériaux leur apparence habituelle. Mais le caractère inhabituel de l’oeuvre vient, en plus de la forme générale, de leur assemblage, de leurs combinaisons inattendues.
Ses oeuvres entraînent le spectateur dans un jeu subtil de la reconnaissance, situé quelque part entre l’espiègle et le déconcertant. On va du connu, ou du moins du reconnaissable, à ce qui ne peut plus être reconnu et tous les scénarii que l’on peut projeter sur la surface de la sculpture s’inscrivent dans cet écart.
De plus, l’usage du langage vient complexifier ce jeu de reconnaissances et de changements d’identité. Rocker évoque des images de musique lourde, de motards à longue crinière et à tenue de cuir, mais aussi de fauteuils à bascule. Hung up II («accroché») peut s’entendre au double sens de «suspendu», mais aussi au sens où l’on dit que l’on fait «une fixation» amoureuse sur quelqu’un. Stay signifie «reste» à l’impératif, mais aussi le fait de «soutenir, renforcer», tant au physique qu’au moral. Les titres de Charles Mason jouent donc bien souvent des doubles ou triples sens. Ils viennent confronter le langage à la sculpture, de manière à accentuer la polysémie que le détournement des objets connus avait déjà mis en place.
L’oeuvre de Charles Mason a affaire à la représentation de soi que l’on offre dans le théâtre de l’intersubjectivité: comment se tenir, sachant que toute identité est nécessairement un arrangement bancal avec les conventions sociales, un compromis négocié avec les méandres de sa psyché?