Ulla von Brandenburg, Haris Epaminonda, Francis Upritchard
Group Show
Ulla von Brandenburg (1974, Karlsruhe, Allemagne), Haris Epaminonda (1980, Nicosie, Chypre) et Francis Upritchard (1976, New Plymouth, Nouvelle-Zélande) sont toutes trois des artistes volontairement expatriées. La question de l’identité et des représentations culturelles se trouve au cœur de leur démarche respective.
L’espace d’exposition semble transformé en un étrange musée ethnographique où des modélisations et maquettes viendraient retracer les différentes civilisations et évolutions de l’histoire humaine. Les cultures d’un autre lieu ou d’un autre temps y sont convoquées.
Profondément influencée par la culture maorie, Francis Upritchard s’est faite connaître pour ses figures quasi-totémiques, réalisées en pâte à modeler et recouvertes de toutes sortes de babioles et tissus chinés dans des brocantes ou vides-greniers.
Le travail d’Haris Epaminonda intègre lui aussi des images et objets collectés — pages de livres ou de magazines, vieilles photographies de voyage, vases, statuettes — tirés de diverses époques et origines allant des débuts de l’humanité au Japon traditionnel.
Passionnée par les rituels folkloriques européens et notamment le carnaval, Ulla von Brandenburg adopte une démarche similaire, travaillant avec d’anciennes images et papier trouvés.
Cependant, et l’enjeu est précisément là , si elles entretiennent toutes les trois un rapport explicite au passé, aucune datation ni origine précise ne peuvent être données. Il n’y a là aucune revendication scientifique. En empruntant à des répertoires d’images, de rites et de pratiques diverses et complexes, les œuvres de ces trois artistes maintiennent volontairement le mystère et l’indétermination.
C’est particulièrement le cas des figures de Francis Upritchard (en pied ou sous formes de curieuses lampes) qui parviennent, dans un étonnant mélange de références, à recréer un univers imprégné de magie et de mysticisme. Tous ces artefacts nous paraissent familiers et inscrits dans notre mémoire collective, sans que nous puissions pour autant les identifiés clairement. Ils créent un espace-temps ambigu entre réalité et fiction, duquel se dégage un profond sentiment d’étrangeté, celui d’une réalité qui a l’air familière.
Le film d’Ulla von Brandenburg, Die Strasse (2013), — qui met en scène l’arrivée d’un homme dans une rue, faite de décors, et dont les protagonistes et leurs pratiques lui sont complètement étrangers — est à ce titre particulièrement évocateur. On pense également à la récente exposition d’Haris Epaminonda au Frac Ile-de-France, qui à l’aide d’éléments identifiés — du point du vue occidental — comme des marqueurs de la culture traditionnelle japonaise (cérémonie du thé, jardin zen, bonzaï,…) nous dévoile un Japon imaginaire et fantasmé («VOL. XVI», Frac Ile-de-France, 2015).
Apportant chacune leurs mythologies personnelles, ces trois artistes mettent en lumière les mécanismes — et ce n’est pas un hasard si elles ont toutes recours de manière plus ou moins explicite à la théâtralité et à la mise en scène — d’élaboration de nos représentations sur l’autre et l’étranger. L’exposition créée ainsi un dialogue fertile où correspondances conceptuelles et formelles laissent entrevoir les singularités de leurs propositions.