Communiqué de presse
André, Diego, Seb, Honet, Stak, Jayone, Zevs, Jonone, L’Atlas et Tanc, Invader, Lek et Fleo
Grandmaster Graff
Renouant avec une opération menée en 1987 par Usines Ephémères, intitulée «Palissar’t», Point Ephémère donne carte blanche à un groupe d’artistes afin d’intervenir sur l’ensemble des rideaux de fer du bâtiment en rez-de-canal, avant le début des travaux de réaménagement. Cette exposition in situ sur une façade de près de 150m rendra ainsi ce lieu à la promenade.
Signe fort de la naissance de ce lieu d’art, cette exposition est aussi l’occasion d’offrir au public un ensemble de pièces réalisées par les artistes et / ou graffeurs les plus représentatifs du dynamisme de la scène urbaine parisienne. À ce titre l’invitation a été lancée à des artistes dont le travail fait écho à l’histoire du graffiti et en constitue la création d’aujourd’hui, comme à ceux dont le travail permet de renouveler l’approche de l’intervention en milieu urbain tout en s’inscrivant dans l’art contemporain.
Cette exposition permet d’affirmer l’importance du graffiti dans le paysage urbain actuel, ainsi que de ses diverses mutations. Depuis quelques années, on assiste à nouveau à une transformation du graffiti hors de son territoire par des pratiques qui tentent de questionner la place importante de l’image, et du «visuel» en général dans l’espace public. Cette mutation est aussi marquée par des pratiques artistiques qui puisent dans les racines de cet art des rues des stratégies de visibilité en direction d’un public averti ou des passants ordinaires, introduisant une notion ludique dans une rue qui devient à nouveau une des scènes de l’art.
Ce qui est le plus marquant est la capacité du graffiti à générer et renouveler des modes d’expression comme la peinture, qu’elle soit sur toile ou dans l’espace, sur le mode de l’installation. Mais cet art offre aussi tout un travail de réflexion sur les logotypes ou la calligraphie, tout en en continuant à proposer des œuvres de sa propre nature sur la base de techniques imaginées à New York dans les années 1970.
Offrir cette façade à l’expression de ces artistes, c’est affirmer la volonté d’ouverture de Point Ephémère à toutes les formes de créations artistiques. C’est affirmer aussi l’ancrage de ce lieu dans une histoire, celle des Usines Ephémères, et celle du graffiti. Le quartier de Stalingrad a joué un rôle premier dans l’introduction en France de cette forme d’art, il y a quelques décennies déjà, et les rideaux de fer eux-mêmes appartiennent, au même titre que les trains, à la mythologie de cette histoire dont l’éphémère fait force de loi.
> Point Ephémère
Point Ephémère est un nouveau centre de dynamiques artistiques dans le 10ème arrondissement de Paris, dans l’ancien bâtiment Point P sur le canal St Martin. En attendant l’ouverture officielle du bâtiment prévue en septembre 2004 et avant le lancement des travaux de réaménagement, l’association Point Ephémère a souhaité émettre un signal auprès du public. Grandmaster Graff est une exposition sur 20 rideaux de fer qui donne carte blanche à des artistes et/ou graffeurs les plus représentatifs du dynamisme de la scène urbaine parisienne.
Les artistes
> André
Figure incontournable du graffiti à Paris, André a fleuri la ville de son amusant Mr A. Rose, noir ou d’autres couleurs, ce personnage à la figure circulaire, clignant de l’œil, aux membres filiformes, aux attitudes facétieuses est devenu, tout comme sa dulcinée Mme A, un véritable héros des rues parisiennes. Cependant, André n’a jamais abandonné ce qui constitue la base même du graffiti, à savoir la signature en couleur. Bien au contraire, après avoir couvert la ville de son nom, c’est vers un autre qualificatif de la ville lumière qu’il se retourne, offrant aux amoureux la possiblité d’un message haut en couleur constituant sa série “Love Graffiti”. Et là, oubliés les surnoms de quelques lettres derrières lesquelles se cachent les graffeurs. Ce sont de vrais prénoms qu’il peint sous la fenêtre de Juliette, aux couleurs d’une chanson pop : Edouard, Marie-Laure, Claire, Victoire, Sidonie… Mais derrière André, se cache une âme, celle de la ville de l’amour, celle du jeu, du sourire, comme une carte postale d’un art généreux. André a participé à de nombreux évènements dont deux expositions qui lui ont été consacrés à Paris et à Tokyo
> Diego
Diego a commencé son travail de graffeur à la fin des années 80 en banlieue parisienne au sein du groupe SMK avant de s’envoler pour les Etats-Unis où il intervient au courant des années 1990 dans le groupe 174. C’est le graffiti new yorkais des années 1970, celui qui porte l’âme des figures emblématiques et presque mythiques des fondements de cet art, qui l’influence le plus. Son intérêt ne va pas vers des grandes pièces colorées ou des fresques, mais bien plutôt vers des modes d’expression où la rapidité, l’agilité, le sens inné des couleurs et des formes permettent de retrouver l’intensité des années fondatrice où se traduit le mieux l’âme de Big Apple. C’est ainsi qu’aujourd’hui son travail se tourne délibérément vers les flops et les tags.
> Seb
Seb fait du graffiti depuis 1986. Son travail est particulièrement axé sur le lettrage, avec notamment une prédilection pour les flops (throw-ups) – réduction du nom à quelques lettres aux formes très arrondies et traitées en deux ou trois couleurs. Ses sources sont avant tout New York, en particulier le travail de Reas, de Ghost ou de Sento et la Finlande où exerce le groupe CDC.
> Honet
Des figures masculines massives, carrées, occupent tout l’espace du support, le mur, l’affiche, le pilier d’autoroute. À ce personnage au trait noir, rouflaquettes et cheveux courts, répond un autre, féminin, dont seuls la chevelure longue, la douceur des traits et le détail d’une fleur ou d’une étoile créent la différence. C’est en quelque sorte entre cette rudesse contenue et silencieuse et cette douceur archétypale que se dessine la ligne de front de cet artiste, écho à la dureté de la vie, des lieux même investis. Double logo? Comme un nom dont l’écho se propage de mur en mur, cette figure à peine changeante d’une pièce à l’autre apparaît comme la signature ultime du peintre, celle du sujet et de son identification mêlé. Un logo devenu objet. Honet a participé à de nombreuses expositions en France et en Europe. Il collabore très souvent avec Stak.
> Stak
Olivier Stak vient lui aussi du mouvement graffiti. Débutant dans les années 1980, c’est en 1995 qu’il transforme son tag en une image logotypé. Il inaugure ainsi une ouverture vers le monde de l’art, de la mode et de la publicité, confrontant les modes opératoires de ces trois mondes pour mieux en démontrer leur perméabilité. C’est en effet aux codes visuels qu’il s’attaque, à commencer par son logo noir formant profil. S’échappant de la contrainte du nom et de la bombe, il multiplie les statements, les néons et les vidéos tout en restant fidèle au traitement frontal et en puisant dans la force des mots de quoi les transformer en image. Il offre une lecture sociale d’éléments urbains en s’appuyant sur une synergie des vocabulaires, des choix esthétiques et de mode de certains groupes sociaux. Stak a participé à de nombreuses expositions en France et en Europe. Il collabore souvent avec Honet.
> Jayone
Initié très tôt au graffiti, il fonde avec Ash et Skki le groupe BBC ou BadBC dès 1982. Ce groupe toujours actif, bien que ses membres développent en parallèle un travail solo, dessine des passerelles entre des domaines aussi différents que la peinture, la vidéo, la musique… De son côté Jayone a réussi à imposer dans son travail pictural ses propres sources, le graffiti, le souci du lettrage qui devient un motif abstrait répété, ainsi qu’une très grande liberté quant aux supports et aux installations. Il a réalisé de nombreuses expositions dont certaines lui a été consacré à Paris, à Tokyo, mais aussi à Berlin ou Hambourg.
> Zevs
Cet acteur-performeur au visage masqué derrière un foulard léopard s’est affirmé comme une sorte de héros fondant ses signes au milieu des signaux et mobiliers urbains. Développant un travail et une réflexion sur la notion d’image et d’icône, il joue avec la multiplicité des codes visuels qui a envahi l’espace public : codes de circulation, publicités… Il affirme son œuvre par un effacement, une sorte de fusion altérant les messages initiaux, comme une sorte d’image subliminale qui se grave dans notre mémoire. Il apparaît ainsi à la fois comme l’héritier d’une culture pop et des situationnistes. Il a participé à de nombreuses expositions en France et en Allemagne.
> Jonone
Cet artiste originaire de New York commence à peindre dans la rue au début des années 1980. Très influencé par son ami A One, il s’ouvre à l’art contemporain américain. Depuis plus de 10 ans, il développe en parallèle à son action de graffeur dans de nombreuses villes, un travail de peinture sur toile où se mêlent influences graffiti et formes abstraites et colorées. La gestualité, la rapidité d’action héritée du graffiti et le jeu des formes abstraites ne sont pas sans rappeler à la fois le travail de Jackson Pollock et celui de Jean-Michel Basquiat. Jonone montre bien comment le graffiti peut aboutir à un travail pictural d’une très grande force poétique. Il a participé à de nombreuses expositions; dont près d’une vingtaine lui a été consacré à Paris, Berlin, Chicago ou Tokyo
> L’Atlas et Tanc
Issus du mouvement graffiti, Tanc et L’Atlas s’expriment sur les murs de Paris depuis 1996. Leurs premiers autographes influencés par la graffiti old school de New York les amènent à s’engager sur la voie d’une recherche calligraphique et typographique qu’ils concrétisent dans la réalisation de logotypes de plus en plus complexes. Intégrant leurs pictogrammes au paysage urbain, stickers et affiches se fondent dans la ville en la marquant de leur empreinte. Ils redémarquent les espaces en s’appropriant murs, espaces publicitaires ou mobilier urbain, confrontant leurs noms à l’abstraction de formes parfois hermétiques au premier regard.
> Invader
L’envahisseur de Paris et de très nombreuses villes et mégapoles à travers le monde marque son passage de cette icône éponyme, star des jeux vidéo d’arcanes. Mêlant les sources de la culture pop électronique aux techniques les plus ancestrales de la mosaïque, INVADER a su inventer des “personnages” hauts en couleur. Il ouvre de nouvelles perspectives d’approche de nos pérégrinations urbaines en développant une stratégie d’intervention sur le modèle des rhizomes et de diffusion par la multiplication des supports – mosaïques, kits d’invasion, cartes d’invasion, stickers, baskets – offrant aux amateurs un véritable rôle d’acteur. Plusieurs expositions lui ont été consacrées à Paris, Tokyo ou Los Angeles.
> Lek et Fleo
LEK commence le graffiti à Paris en 1989 et intègre au début des années 1990 le groupe Lettres Contre Architecture, fondé par FLEO. Leur travail s’oriente vers une réflexion typographique et formelle dominée par une forme d’abstraction géométrique. Ils opposent ainsi leurs formes anguleuses aux No Man’s land des extensions urbaines avec un véritable souci pour leurs architectures.
Commissariat
Jean-Marc Avrilla, assisté de Claire Laurence, avec la collaboration de Black Block pour la direction artistique.
Jean-Marc Avrilla est curator et éditeur indépendant. Après avoir exercé les fonctions de commissaire au capc Musée d’art contemporain de Bordeaux où il a notamment réalisé des expositions avec Richard Serra, Lawrence Weiner, Matthew Barney, Fabrice Hybert, Pierrick Sorin, Céleste Boursier-Mougenot, il a monté un site de projets d’artistes sur internet – www.united-art-space.com – avec l’artiste Valéry Grancher.
Il vient de publier un ouvrage d’anthologie de la photographie de mode pour les éditions 7L . La diversité de ses approches de l’art contemporain l’a conduit à s’intéresser à des formes d’art en marge des mouvements dominants, et à suivre de très près le travail d’artistes s’inspirant des sources du graffiti comme André, Space Invader ou Zevs. Il prépare actuellement une anthologie des plus importants graffeurs new yorkais des années 1990 sous l’angle de leur travail des flops.