Catharina Van Eetvelde
Glutamic Acid
L’artiste belge, Catharina van Eetvelde explore, avec insistance, à la fois le potentiel expressif et l’art économe de la ligne dans des compositions qui maintiennent ces deux aspects dans une tension telle que ses dessins semblent parfois vibrer sur la feuille.
Le regard et l’esprit parcourent chaque dessin pour assembler des formes abstraites, organiques et mécaniques (certaines rappelant un circuit électrique, d’autres évoquant des formes vivantes élémentaires ou plus élaborées), des structures architecturales, des coupes de cellules, des outils mystérieux, des créatures inventées. A les regarder comme un tout revient presque à lire une belle phrase composée de mots qui ne forment pas un message linéaire cohérent. Pourtant, van Eetvelde n’est pas délibérément énigmatique. C’est plutôt qu’elle utilise la répétition discrète, cependant certaine, d’un geste, d’une couleur, d’une forme ou d’un trait pour nous rappeler subtilement une chose déjà vue, ou pour annoncer une page pas encore rencontrée. Il s’ensuit que les fils narratifs apparaissent et disparaissent, paradoxalement utiles, comme s’ils naissaient de ces oxymores, à savoir libre association contrôlée ou spontanéité maîtrisée.
Fascinée par la relation entre le dessin et le langage, van Eetvelde ne se contente pas de faire bouger ses dessins sur papier dans ses films d’animation (Slice 2004-5, Cruise 2002-3, Whether Water is Held Responsible 2006, Glu 2007), elle invente une syntaxe entièrement nouvelle tirée de la confrontation entre les deux processus. Alors que le temps et le mouvement jouent un rôle important dans ses oeuvres sur papier, l’animation permet à van Eetvelde d’introduire des transformations temporelles et physiques, compositions et décompositions, ou heureux hasards, que seule l’image animée permet.
Si le dessin conserve son statut historique en tant que composante fondamentale de la représentation à notre époque de plus en plus numérisée, par sa façon d’aborder ce medium, van Eetvelde tire parti de tout le potentiel mécanique et technologique d’aujourd’hui.
Avec Glu, son nouveau film, van Eetvelde poursuit sa recherche sur l’interface entre l’image dessinée et l’image animée, cette fois, en mettant en mouvement un personnage féminin qui subit sans cesse une série de transformations. Ce qui au premier abord semble dû au hasard est en fait structuré comme un chant, avec son habituelle imagerie fragmentaire du circuit cellulaire, et sert de refrain qui vient interrompre les séquences. La bande-son hypnotique (par le groupe de musique électronique to rococo rot basé à Berlin) allie des rythmes staccato, des bips, et le charme de basses et de violons qui se marient comme par magie aux mouvements de la fille. Comme tout personnage séduisant, celle-ci captive notre regard et nous attire alors que nous imaginons ce qui pourrait ensuite lui arriver. Mais Glu met aussi en scène le fait d’être observé, avec la paire d’yeux rouges pixellisés projetés sur le mur voisin qui considère l’ensemble avec intérêt.
critique
Catharina Van Eetvelde.