ART | EXPO

Flanders Technology

15 Sep - 02 Oct 2004

Deux expos : Denicolai et Provoost à Glassbox, accompagnés de Sammy Engramer à la librairie Florence Loewy. Des projets architecturaux démesurés dans le registre d’une pure utopie, telle la construction d’une montagne sur le plat pays flamand ; telle la réflexion sur les façons d’inscrire une sculpture habitable dans un parc public. Trois expérimentateurs de la logique imaginaire.

Simona Denicolai et Ivo Provoost développent des travaux qui m’impressionnent. Dans le registre d’une pure utopie, ils nourrissent des projets démesurés. Par exemple, durant trois ans, et en compagnie de David Evrard (artiste belge), ils décidèrent de travailler sur la construction d’une ville, Building/Underwood, dans le sud de la France — un peu comme des pionniers américains prenant la décision de construire un casino en plein désert. Un autre exemple relate la construction (dans le cadre d’un concours) d’une montage échelle 1, Pannenberg, sur le plat pays flamand (en collaboration avec Nathalie Mertens et Christophe Terlinden) — dès fois que les polders ne résistent pas à la fonte des neiges. Conforme à l’esprit belge, ces projets sont tout à fait réalistes — du moins, aux vues des techniques existantes, ces projets sont constructibles.

Bien que nous travaillons chacun de notre coté, nous profitons réciproquement de nos séjours en France ou en Belgique pour partager des points de vues sur l’art contemporain. Et suite à quelques rencontres, ce qui devait arriver arriva : de façon totalement inconsciente, j’ai eu l’idée de fabriquer une œuvre très inspirée des travaux d’Ivo et Simona.

L’une des dernières propositions de Simona Denicolai et Ivo Provoost, Residenz, consiste à réfléchir sur les façons d’inscrire une sculpture habitable dans un parc public. Les premières recherches sont nourries d’un ensemble de maquettes sous une forme singulière. Les maquettes mixent des contenants d’objets de consommation: canette de bière + paquet de café; paquet de gâteau + boite à thé; boite à cigare + emballage d’un tube de colle; etc. Sur ce même principe, les artistes composent, à l’aide de différents éléments architecturaux, et produits «enveloppe» (hangar agricole, chalet en bois, citerne alimentaire, armoire métallique), une sculpture à l’échelle 1 en mixant des produits de l’économie locale. L’enjeu est de combiner deux statuts juridiquement différents; celui d’une sculpture publique, pour ce qui concerne l’extérieur; et celui d’un espace privé (propriété des artistes), pour l’intérieur. À cette échelle, la question du contenant/contenu devient entre autre socio-économique. Voici ce qui peut arriver si un jour on se demande «à qui appartient l’intérieur d’une œuvre d’art ?». Ce projet a été présenté lors d’une résidence au Centre d’Art de Pougues-Les-Eaux en octobre 2003.

Au cours de l’année 2003, il me vient l’idée de fabriquer des maquettes empaquetant des denrées alimentaires. Les intitulés des maquettes sont les suivants: Une Résidence d’Eté pour une Saucisse; Une Maison Individuelle pour 1 kilo de Nouilles; Un Syndicat d’Initiative pour une Patate. Sous la forme de maquette traditionnelle, ces propositions sont réalisées, financées et suivies par Jean-Christophe Rouillon — un architecte ayant trouvé l’idée tout à fait à son goût.

En tant que plasticien, je choisis des contenus sous la forme de denrées alimentaires (pâtes, pomme de terre, saucisse) autour desquelles des architectures (constructibles) prennent forme. Le principe est de construire un emballage architectural échelle 1 pour une denrée alimentaire. En fait, je propose des objets équivalents aux maquettes d’Ivo & Simona. Il y a cependant une nuance formelle. Ivo et Simona s’approprient les contenants de denrées alimentaires pour créer des contenus architecturaux – et aboutir à une sculpture constructible. Dans mon cas, j’utilise le contenu (se trouvant dans un contenant, c’est-à-dire l’emballage plastique d’une saucisse, le filet de la pomme de terre, le paquet des pâtes) afin d’inventer un contenant architectural — également constructible.
<br<L’usage dialectique des termes contenant / contenu ouvre sur une inversion, et donc sur une création d’identités (réciproquement) négatives. En des termes plus clairs, la phrase : «Le contenant d’une denrée alimentaire crée des contenus architecturaux» a un équivalent négatif tel que : «le contenu denrée alimentaire crée des contenants architecturaux».

Je force les propositions afin qu’elles s’inscrivent dans le cadre d’identités négatives. En définitive, il est plus juste de dire : «Le contenant d’une denrée alimentaire crée des contenus architecturaux» a un équivalent négatif tel que : «le contenu d’une denrée alimentaire — c’est-à-dire la denrée alimentaire sous emballage, crée des contenants architecturaux».

Ce qui m’intéresse dans l’étude des logiques de l’imaginaire, c’est naturellement ce qui fait image, et non ce qui produit de la langue ou du langage — bien que je ne puisse pas y échapper. Car si l’on veux s’amuser à définir quel est le contenant d’une denrée alimentaire, l’on peut se rapporter aux épluchures d’une patate, ou bien à la peau d’une saucisse — quoique pour les pâtes, c’est moins évident…

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