Avec l’exposition « Tableaux 1966-1976 », à la galerie parisienne Loevenbruck, une décennie de la production picturale de Gilles Aillaud est à découvrir à travers six tableaux majeurs.
Des portraits animaliers qui ne s’approprient pas leur sujet
Les tableaux de Gilles Aillaud sont toujours demeurés fidèles à la thématique animalière qui le fascine depuis son enfance, lorsqu’il visitait avec sa sœur le zoo du Jardin des Plantes comme d’autres fréquentent les musées. L’exposition dévoile six tableaux souvent de très grand format dont certains n’ont pas été présentés au public depuis vingt-cinq ans.
Les teintes et la lumière jouent un rôle important dans les portraits animaliers de Gilles Aillaud. Les tableaux intitulés Deux eaux, Rhinocéros et Intérieur et hippopotame frappent par leur aspect glacial et terne. Dans le premier, les décors en béton qui forment le bassin du crocodile transmettent toute leur artificialité à l’œuvre, dans les deux suivants, la lumière blanche et froide qui tombe sur les animaux accentue la tristesse des intérieurs gris dans lesquels ils sont confinés. Dans les toiles Mangouste, nuit rouge et Intérieur jaune et vasistas, renvoient au contraire la vision d’espaces remplis de lumière électrique ou chaleureuse.
 Un style non naturaliste
La peinture de Gilles Aillaud rejoint celle de Vermeer qu’il avait d’ailleurs étudiée. Comme le maître néerlandais, il laisse les sujets venir à lui, ne les peint que tels qu’ils se montrent. Sa démarche consiste à représenter les choses non pas comme il le souhaite mais comme « elles le veulent ».
Le regard du peintre est semblable à celui du photographe qui parvient à saisir l’« instant décisif » décrit par Henri Cartier-Bresson. Aucun des animaux ne fixe celui qui le portraiture, n’est dans une situation de pose ni mis en valeur. Tous sont peints à hauteur d’homme et leur regard est vague, ignore leur observateur comme le spectateur du tableau.
Le style de Gilles Aillaud ne se veut cependant jamais naturaliste. Plein de délicatesse pour ses sujets, qu’il refuse de s’approprier, le peintre laisse s’exprimer toute leur singularité, qui se traduit par un traitement pictural très personnel.