George Brecht
Né George MacDiarmid aux États-Unis, George Brecht s’est imposé comme l’un des membres essentiels du mouvement Fluxus dans les années 1960. Pourtant, sa formation de chimiste ne laissait en rien présager un tel parcours. En 1956-1957, il rédige un premier texte fondateur, Chance Imagery, réflexion sur le rôle de la chance dans l’avant-garde artistique et la science du XXe siècle. Au même moment, il développe ses Chance painting, draps trempés au hasard dans la peinture, action qui lui permet de se départir du mythe du hasard chez les expressionnistes abstraits comme Jackson Pollock.
En 1959, il expose pour la première fois, alors qu’il suit les enseignements de John Cage et Allan Kaprow à la New School of Research de New York. L’influence de Cage sera majeure sur Brecht et sur les recherches qu’il conduit sur le hasard et l’aléatoire. Dès 1960, il met au point ses «Events». Qu’ils aient ou non recours à des objets, ces «events» sont des partitions écrites décrivant sommairement la démarche à suivre : « Allumez la radio. Au premier son, éteignez-la ».
Motor Vehicle Sundown, réalisé en 1960, est l’un des premiers «events» conscient des dangers d’un rapprochement de son écriture avec le théâtre. Les conducteurs de plusieurs voitures se sont vus remettre dans un ordre totalement aléatoire des cartes sur lesquelles sont notées 22 instructions différentes rédigées par l’artiste. L’«events» est donc une combinaison où l’artiste et «l’actant» peuvent interagir.
George Brecht a joué un rôle majeur dans la diffusion et le développement de Fluxus. Ce courant artistique a été lancé en 1962 depuis Wiesbaden en Allemagne par George Maciunas lors d’un festival destiné à abolir les frontières entre les arts et à remettre en cause les modes de perception grâce à des performances, la musique concrète et des gestes du quotidien. Autour de Maciunas, Robert Filliou, Ben Vautier, Wolf Vostell ou Nam June Paik se constituait le noyau dur du courant Fluxus.
En 1963, il créé avec Robert Watts le festival Yam à New York, dédié aux arts alternatifs et «habituellement rejetés», globalement invendables. Ce rejet des lois du marché et des institutions artistiques, du fétichisme des objets artistiques, Brecht le partage avec le Français Robert Filliou. Ensemble, ils ouvrent une galerie-boutique à Villefranche à partir de 1965, «La Cédille qui sourit», et produisent des multiples répondant à cette logique de désacralisation de l’art. Dans sa recherche du hasard, Brecht privilégie la rédaction de ses fiches de propositions mais également les modèles de jeux (puzzle, échecs, cartes à jouer). Il quitte définitivement les États-Unis et s’installe en Allemagne, après être resté en France jusqu’en 1968. En 1973, quand Ben lui demande s’il se considérait comme un artiste, Brecht répondit : «Je ne pense jamais à ce que je fais comme étant de l’art ou pas. C’est une activité, c’est tout».