Pour la Paris Design Week 2019 (PDW19), le Centre Tchèque de Paris propose trois expositions. Trois facettes du design tchèque, dans ses allers-retours entre histoire et contemporain. 2019 marquant le centenaire du Bauhaus, le Centre Tchèque présente deux expositions en lien. Pour resituer brièvement, le Bau-Haus [littéralement ‘construction-maison’] est une école allemande connue pour son décloisonnement entre art, design, urbanisme et architecture. Dans son manifeste, Walter Gropius explique que le but de toute activité artistique et imaginative est la construction. Orienté objet, le Bauhaus entérine le tournant de l’art moderne. Et ce, en Allemagne comme dans toute l’Europe au sortir de la Première Guerre mondiale. Pour la Paris Design Week, le Centre Tchèque présente ainsi une exposition photographique de Filip Šlapal, « Bauhaus – Réflexion ». Mais fidèle à l’esprit constructif et orienté objet du mouvement, il présente également l’exposition « Mobilier Tubulaire Slezak ».
Une chaise à l’origine disputée : la cantilever, selon Mart Stam ou Marcel Breuer
Si tout le monde connaît cette collection de mobilier, son histoire est peut-être moins courue. Chaises, fauteuils, bancs, tables… Ce type de pièces tubulaires est tellement ancré dans la culture visuelle qu’il frôle l’invisibilité. Pourtant, au début du XXe siècle, le procédé est révolutionnaire. Et la chaise de type cantilever, a connu une histoire mouvementée. Plutôt que de reposer sur quatre pieds, elle repose sur une structure tubulaire courbée. Deux personnes en ont revendiqué la paternité (le brevet) : Marcel Breuer et Mart Stam. Architecte et designer allemand, Marcel Breuer (1902-1981) a fait ses études au Bauhaus de Weimar. Il a ensuite enseigné au Bauhaus de Dessau. Designer et architecte néerlandais, Mart Stam (1899-1986) a d’abord étudié à l’École Royale des Hautes Études d’Amsterdam, avant de s’installer à Berlin, vers 1922. Affilié à la Nouvelle Objectivité [Neue Sachlichkeit], Mart Stam cultive alors un style concret.
« Mobilier tubulaire Slezak » : l’entreprise Slezak célèbre le centenaire du Bauhaus
L’idée de la chaise de type cantilever a probablement transité via l’architecte Ludwig Mies van der Rohe. Mart Stam et Marcel Breuer ont chacun développé différentes variations autour du modèle. Et notamment la chaise Luge (1926), pour Mart Stam. À la fin des années 1920, les deux designers se sont affrontés en justice pour savoir qui en était le primo-concepteur. Ces dernières années (car le débat court toujours), la balance penche plutôt vers Mart Stam. En amont, dès 1908 le serrurier et ferronnier d’art Robert Slezak installe son atelier et développe une technique de galvanisation pour le traitement du métal. L’atelier devient usine et se spécialise dans le mobilier chromé. Réquisitionnée par l’armée allemande pendant la Seconde Guerre mondiale, elle est nationalisée par les communistes en 1948. Re-privatisée en 1992, la société Kovonax (Slezákovy závody) a décidé de fêter le centenaire du Bauhaus en rééditant le mobilier de Mart Stam.
Le mobilier tubulaire de Mart Stam revisité par Frédéric Gaunet et Anne-Marie Builles
Pour cette réédition, Slezak s’est tourné vers le designer parisien Frédéric Gaunet, fondateur de Zigzag. Avec la directrice de projet Anne-Marie Builles, ils ont co-signé une collection réinterprétant le mobilier de Mart Stam. À commencer par la chaise Luge (1926). La collection comprend la chaise S10, le tabouret S9, le fauteuil K10, la table et le banc Axa. Chaque pièce reprend le concept de Mart Stam. Soit un mobilier tubulaire ultraléger, alliant structure en acier chromé et pièces de contact (assise, dossier, accoudoirs) en bois. Exposition cohérente, le « Mobilier tubulaire Slezak » est un aussi un moment de syncrétisme. Entre République Tchèque, Allemagne, Pays-Bas et France ; de 1908 à 2019. Aux côtés de ces deux expositions, le Centre Tchèque ouvre également un Design Pop Up Store exceptionnel, du 6 au 14 septembre. En partenariat avec la galerie pragoise Deelive design experience, dans un esprit cosmopolite.