L’exposition « The Potato Eaters / Sunset Stories » à la galerie Michel Rein dévoile de nouvelles œuvres entre sculptures et peintures de Franck Scurti. Un dialogue fécond entre une peinture de maître et des images issues des réseaux sociaux.
« The Potato Eaters / Sunset Stories » : quand la peinture de Vincent Van Gogh se mesure aux images d’Instagram
Le titre de l’exposition « The Potato Eaters / Sunset Stories » (Les mangeurs de pomme de terre / Histoires de coucher de soleil) fixe la construction en miroir autour de laquelle elle est conçue. L’inspiration des nouvelles œuvres de Franck Scurti est en effet double : d’un côté, le célèbre tableau Les Mangeurs de pommes de terre peint en 1885 par Vincent Van Gogh et de l’autre les innombrables images retouchées de couchers de soleil publiées sur Instagram.
Les nouvelles œuvres de Franck Scurti, mêlant sculptures et peintures, tracent un surprenant lien entre une toile de Vincent Van Gogh et les images numériquement retouchées du coucher de soleil publiées sur Instagram. Le tableau Les Mangeurs de pommes de terre montre une famille de paysans attablée autour d’un plat de pommes de terre, seulement éclairée par la faible lumière verdâtre d’une lampe à huile, une scène que le peintre avait enrichie en sertissant la toile d’or et de cuivre.
A la suite de Vincent Van Gogh, Franck Scurti prolonge l’anoblissement de la réalité miséreuse dépeinte par l’artiste hollandais à travers une série de sculptures intitulée The Potato Eaters qui en reprend les divers éléments dans une version presque luxueuse. On retrouve ainsi le filet de pommes de terre du tableau de Vincent Van Gogh ici recouvert de feuilles d’or et accroché à des éléments tels qu’un poteau ou une table, en cuivre brillant.
Franck Scurti s’interroge sur la condition de l’artiste et la valeur de l’image
La série intitulée Sunset Stories reprend quant à elle la démarche de Vincent Van Gogh en l’inversant. Les images très formatées et artificielles de couchers de soleil et palmiers qui envahissent Instagram ont été scrupuleusement reproduites en peinture par Franck Scurti, avant d’être entourées de cadres complexes faits de divers rebuts trouvés dans son atelier tels que des chutes de bois partiellement peintes, des morceaux de grillage ou de filet en plastique, du carton, de l’aluminium, du cuivre, du plexiglas… Dépassant largement en taille et en visibilité la peinture qu’ils entourent de détritus, ces cadres évoquent les mouvements du doigt sur les écrans tactiles de téléphone, tout en extrayant l’image éphémère du flux numérique pour la replacer dans la réalité plastique.
Le dialogue entre les séries The Potato Eaters et Sunset Stories fait ressortir les caractéristiques respectives du tableau de Vincent Van Gogh et des photographies postées sur Instagram : d’un côté, un peintre observant, imaginant et représentant avec profondeur et patience une réalité miséreuse, de l’autre, des utilisateurs des réseaux sociaux générant en un instant une image caricaturale du bonheur, fruit d’un imaginaire pauvre. À travers ce dialogue, Franck Scurti engage un questionnement sur la condition de l’artiste et la valeur de l’image.
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