Présentation
Collectif
Fragile no.65
C’est en continuité avec les dossiers précédents portant sur les actions réciproques et le déchet que nous avons voulu produire ce numéro, en posant un regard sur la fragilisation des différents paramètres de l’art, de ses matériaux, de ses dispositifs et de ses modes de production, jusqu’à la fragilisation de la figure même de l’artiste.
C’est aussi dans cet esprit que les auteurs ont répondu à notre appel, rendant possible une réflexion élargie où le fragile apparaît sous sa forme matérielle – par la friabilité de l’objet ou le caractère éphémère de l’oeuvre, et subséquemment par leurs modalités de conservation et où il est également pensé sous les divers aspects ontologiques qui le soustendent.
Ainsi la fragilité trouve-t-elle sa place dans un essai sur le sublime et l’esthétique de l’inadéquation rencontrés dans des natures mortes photographiques – celles-ci mises en parallèle avec les Vanités de la Renaissance (Falvey), tandis que la singularité de l’être (et par extension sa fragilité) est opposée à la notion de plasticité, soulignant notamment les tentatives de dépasser la matière (en l’occurrence le verre et le plastique) « pour en révéler « l’esprit », c’est-à -dire sa teneur culturelle et civilisationnelle » (Poulin).
Bien sûr, les multiples eriientations des analyses ont été inspirées par autant doeuvres troitant, directement ou indirectement, de la fragilité. Plus que jamais nous remarquons que ce sont les œuvres elles-mêmes, par leur délicatesse, par la précarité de leur mise en forme ou par la symbolique des sujets et des matériaux choisis, qui ont motivé les propos des auteurs. Ainsi la nature éphémère des installations de Chih-Chien Wang à Junne Poitras, la charge figurative du sucre chez Aude Moreau, lu projets immatériels de Patrick Beaulieu et l’approche intimiste de Sophie Calle ont-ils servi de base solide à la formulation des différentes utopies et contribué à l’équilibre entre l’oeuvre et son analyse, une des faces de ce dossier.
Sylvette Babin