Communiqué de presse
Anh Duong
Flowers
C’est à propos d’un portrait de fleurs, d’un bouquet de visages, d’un ensemble de corps. Chaque tige est un mouvement, chaque pétale est un regard, chaque pistil une caresse. Une chorégraphie de la beauté, où chaque fleur trouve sa place, sa direction dans la toile, rivalisant les unes avec les autres, chacune dans sa propre expression.
C’est l’histoire du moment juste avant la fin, la cristallisation de la beauté avant qu’elle ne se fane, ce moment magique que l’on veut éternel et pourtant qui m’échappe, tu m’as déjà oubliée.. (…)
C’est une histoire qui meurt, et une autre qui prend vie. J’ai commencé cette série de fleurs en faisant le deuil d’un amour, j’ai continué cette série à la recherche de ce moment parfait avant que tout s’arrête, avec d’autres lèvres qui m’ont fait t’oublier, d’autres caresses qui m’ont recoiffée, et aujourd’hui c’est lui qui me donne envie. La fleur est là pour dire je t’aime, elle est là aussi le jour où l’on meurt. Dans cette recherche de la perfection, de toile en toile, la décrépitude aussi s’est parfois installée, un pétale est tombé, une tige s’est courbée, car la beauté est à son fort quand elle flirte avec la mort.
Anh Duong, janvier 2005
Depuis ses débuts en 1988, Anh Duong peint exclusivement des portraits et autoportraits, reflets de moments donnés ou d’humeurs particulières, qui s’enchaînent comme les pages d’un journal intime. Elle considère le portrait comme un jeu dialectique avec l’image du miroir, un moyen d’expérimenter la peinture au jour le jour, en faisant abstraction d’un réalisme purement figuratif.
Dans cette analyse permanente de soi-même et du monde qui l’entoure, Anh Duong pousse aujourd’hui plus loin les limites de son champ d’investigation. Après le succès de ses premiers autoportraits en bronze exposés par la galerie à la FIAC 2004, l’artiste présentera ses nouvelles créations, une trentaine d’huiles sur toile aux formats différents, des « portraits de fleurs »… Vases remplis de bouquets de lis, de roses, de tulipes ou de pivoines, sur fond uni, beige ou noir… Comme dans ses portraits, l’artiste transcrit la nature et la force de ses sentiments, représentant les fleurs de façon expressive au moyen d’empâtements très colorés, opposée à la transparence donnée au support dans une gestuelle fluide et linéaire.
Anh Duong poursuit ici son journal intime, donnant à ses toiles des titres narratifs (Les mémoires d’un canapé, Les dessous d’une obsession…), même si les détails de l’histoire ainsi contée demeurent cachés du spectateur. En établissant un parallèle entre ses états d’âme et les fleurs, l’artiste se rapproche inconsciemment de la démarche des Surréalistes, qui voyaient en la plante le symbole de la création artistique, qui naît, s’épanouit puis disparaît… À l’image d’une Frida Kahlo, à laquelle elle est souvent comparée, ses bouquets sont le fruit d’une osmose entre ses sentiments intérieurs et les événements extérieurs qui l’affectent. Surtout, ces toiles montrent comment, dans le regard d’Anh Duong, la fleur et le bouquet prennent une valeur amoureuse très significative, comme pour Matisse, qui y voyait un gage d’amour, voire de séduction, le bouquet étant le détenteur secret d’une espérance amoureuse.
La démarche d’Anh Duong semble ici décalée, avec le charme de la désuétude, à notre époque où la peinture de fleurs est totalement déconsidérée flirtant même parfois avec une certaine incarnation kitsch du mauvais genre, et où peu d’oeuvres artistiques scrutent directement la nature et les plantes. Dans ce monde où la fleur incarne l’artificiel et l’illusoire, Anh Duong nous offre ainsi une peinture paradoxalement très authentique, pleine d’émotion… Sans doute, son autoportrait le plus intime ?!Â
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