Communiqué de presse
Mathieu Renard
Fear
Mathieu Renard prolonge dans son nouveau projet « Fear » son travail sur le détournement d’images photographiques ou d’illustrations de vieux documents qu’il transforme à l’aide d’encre, peinture ou stylo feutre pour transformer leurs sens. Ainsi il altère le discours originel pour en donner une nouvelle lecture politique, sociétale et/ou artistique.Â
Il subvertit ici d’anciennes photographies issues de magazines américains montrant des « gated communities » (ensembles résidentiels collectifs sécurisés) et leurs habitants. Chaque image se présente comme une couverture de magazine troquant le logo de « Life » magazine pour celui de « Fear of a black » planet, titre de l’album de Public Enemy. Cet aspect formel fait écho à la première fonction de l’espace Kiosque/Images avec ses rayonnages de librairie.
L’artiste aborde le problème de la ségrégation raciale aux États-Unis, où, malgré des lois contre ce phénomène, il existe un racisme latent qui se manifeste dans le « white flight » (déménagement des Blancs lorsque des Noirs s’installent dans le quartier). Cette attitude poussée à son paroxysme conduit certains à s’isoler dans des quartiers fermés basés sur l’homogénéité sociale voire ethnique. Ce repliement sur soi, exclusif, élitiste et anti-social, leur donne une illusion de contrôle face à la violence associée aux minorités, un soulagement à leurs peurs tout en renforçant la ghettoïsation et maintenant les Noirs dans un statut de citoyens de seconde classe. Les paroles du morceau « Fear of a black « planet en sont symptomatiques : « Are you afraid of the mix of Black and White… I’ve been wondering why People livin’ in fear of my shade… But they got me on the run, treat me like I have a gun ».
Mathieu Renard traduit plastiquement ce malaise par des formes noires qui s’introduisent insidieusement, symboles de leur peur qu’ils essaient de maintenir à l’extérieur, mais qui se faufilent et s’emparent d’eux. Les résidents, aux visages satisfaits, saisis dans leur quotidien, semblent ignorer les présences hostiles et leurs monstrueuses mutations. L’artiste emprunte, non sans humour, l’esthétique des films de science fiction des années 50.
Ces œuvres pourraient nous apparaître comme autant de palimpsestes, recyclant et se réappropriant des documents préexistants pour les recontextualiser. Max Ernst introduisit le premier la technique d’ »Übermahlung », qui en peignant sur des images « readymade », nous confronte à l’irrationnel. Cette sorte de parasitage rappelle également la peinture détournée d’Asger Jorn, qui avec ses « modifications » situationnistes, « défigurait » avec de la peinture des tableaux trouvés aux puces, décomposant la culture dominante pour créer de nouvelles valeurs.
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Vernissage le lundi 26 mai à partir de 19h.