Farah Atassi
Farah Atassi
Alors que ses premières peintures d’intérieurs (2008-2011) donnaient à voir des espaces vétustes, pour la plupart des reproductions de maisons collectives de l’ère soviétique, les nouvelles œuvres de Farah Atassi confirment une rupture amorcée en 2012 avec Workshop. Le modernisme subsiste ici non plus sous la forme de la ruine et du désenchantement, mais par sa célébration.
Farah Atassi présente ainsi des toiles réalisées à New York lors de sa résidence à l’ISCP. Dans cette proposition, le modernisme est confronté à ses esthétiques rivales: l’expressionnisme allemand et l’ornement folklorique.
Les toiles déploient un motif en «all-over» construit à partir d’une grille, élément cardinal du modernisme. Occupant la surface entière de la toile, le motif produit un effet paradoxal où la planéité nie la perspective illusionniste du tableau. Dans un dédale de carreaux construisant efficacement la composition, trouvent à s’imbriquer des «displays» d’objets: modèles, maquettes de bâtiments ou d’usines et jouets, issus des avant-gardes européennes. Ces jeux de construction, inspirés des sets pédagogiques allemands du début du XXe siècle, sont disposés sur des socles ou à même le sol de ces intérieurs avec lesquels ils dialoguent subtilement.
Le double dispositif (fond en all-over/display d’objets) présent dans chacune des toiles de Farah Atassi permet de créer une dialectique qui confronte le modernisme à des esthétiques généralement opposées que sont l’expressionnisme et l’ornement.
Ainsi dans Toy Town II, les zigzags du fond brisent la grille moderniste et font écho aux cathédrales expressionnistes de Lyonel Feininger. Dans Tabou I et II, se greffent sur la trame moderniste des ornements issus du folklore allemand. Ces jeux d’opposition esthétique lui ont été inspirés des Nibelungen de Fritz Lang, où l’on retrouve étrangement, à la fois l’esthétique du Bauhaus et du folklore allemand. Avec ces nouvelles toiles, Farah Atassi propose des espaces insolites et mystérieux qui ne cessent de nous fasciner.