Communiqué de presse
Carl D’Alvia
Exposition personnelle – Dessins et sculptures
Empathie et pied de nez
Carl D’Alvia nous tend un piège. De prime abord nous commençons par formuler un constat simple et rapide: D’Alvia est un sculpteur et un dessinateur qui crée des animaux imaginaires, drôles et poilus ressemblant, à des personnages de bande dessinée ou des peluches d’enfant. La rapidité de ce constat est d’autant plus simple que ses compositions sont précises, sobres et comportent peu de sujets.
Toutefois ce premier niveau d’entendement nous laisse étonnamment perplexes et songeurs. C’est curieux… les images de D’Alvia restent imprégnées avec force dans nos esprits. Comme si ses oeuvres agissaient avec retardement, en commençant par le fond, c’est à dire l’émotion. Viennent ensuite, se bousculant aux portillons de la matière grise, une poignée de références à l’histoire de l’art, tendant vers la révérence, ou au contraire, le pied de nez.
Les personnages de D’Alvia sont certes très attachants et plein d’humour. L’homme et la vie sont là où on ne les attend pas. Les «singes» jouent du piano (The Piano, 2007), les champignons ont des pattes (Mr Shroom, 2007) et les pierres sont poilues (Kiki, 2004). Mais plaisantent-ils ? Ils sont immobiles et ont l’air résignés. Aucune tension n’est palpable, aucune dynamique. La communication est entravée par l’absence de regards et la fourrure agit comme une frontière ou un bouclier qui isole et protège. Il est intéressant aussi de noter que les sculptures sont nonréfléchissantes.
La fourrure absorbe le son et la peinture mate absorbe la lumière. Ces détails plastiques renforcent le caractère isolé de ses sujets. Aussi, le clin d’oeil au monde de l’enfance ajoute une dimension mélancolique. Les oeuvres de Carl D’Alvia, sur un ton léger et empreint d’humour, se tournent vers un passé révolu où les êtres étaient unis, en couple (Lop, Lop, 2009) ou en famille, (Family, 2007). Les frontières seraient donc à la fois physiques et temporelles.
Toutefois, d’un point de vue formel, l’héritage et la continuité avec le passé sont frappants. D’Alvia, d’origine Italienne, est d’abord et avant tout un enfant du Baroque. En attestent l’exigence technique, la maîtrise du drapé et des demi teintes, l’absence de frontières entre l’ornement et la figure… et le pouvoir allégorique des oeuvres aussi, avec plusieurs lectures possibles. Ce qui n’empêche pas D’Alvia de marquer une distance vis-à -vis de cette école et de lui faire son pied de nez. Ceci est fait en utilisant l’humour mais aussi un drapé plus épais qui enveloppe entièrement le corps du sujet.
Habitant des Etats-Unis, D’Alvia s’inspire aussi du Pop art en lui empruntant son univers coloré et synthétique, ses symboles qui marquent l’enfance, comme la BD, et la notion d’oeuvre multiple. Néanmoins ses séries de sculptures figurent en nombre très limitées (5 maximum) et l’évocation de la mélancolie ou de l’angoisse existentielle dans son travail est volontairement absente du Pop art. Pied de nez au Minimalisme aussi. Né en réaction au côté très subjectif de l’expressionnisme et réfutant toute tentative illusionniste, ce courant adopte habituellement des formes simples, géométriques et sans artifices. D’Alvia en est très friand mais en guise de réponse, il nous propose… des monolithes poilus, peut-être même vivants.