Bien qu’achevée, la Biennale de la Danse de Lyon 2018… Joue les prolongations. Avec la performance Bienvenue (2017), la chorégraphe suisse Eugénie Rebetez livre un solo un peu déjanté autour du corps-maison. Une boule d’énergie à la dynamique maîtrisée. Femme aux formes plantureuses et généreuses, Eugénie Rebetez embrasse cette sensualité en assumant le débordement. Petits rires aigus, grommellements impatients, petits sauts de puce ou grandes enjambées et roulades… Accords furieux plaqués sur un clavier… Pour mieux se transformer en mélodie accompagnée d’une voix flûtée… Il y a comme un tournis dans la pièce chorégraphique Bienvenue. Quelque-chose de terriblement féminin, culturellement féminin. Jusqu’à plonger même dans une forme d’exercice militaire d’entraînement au féminin. Co-réalisée avec Martin Zimmermann (également présent à la Biennale de la Danse 2018 avec Eins Zwei Drei), Bienvenue brûle à toute vitesse. Et ce que ces deux chorégraphes ont en commun, c’est notamment l’humour burlesque.
Bienvenue d’Eugénie Rebetez : une performance chorégraphique vitaminée
Est-ce un cliché de dire que dans les pays polyglottes, l’expression corporelle joue un rôle-clé ? Un renfort bienvenu quand le vocabulaire ne vient pas dans la bonne langue, ou avec un accent à couper au couteau ? Eugénie Rebetez a grandi dans le Jura suisse, elle a étudié en Belgique à Louvain-la-Neuve, à Arnhem aux Pays-Bas, et vit actuellement à Zurich en Suisse. Un voyage linguistique qui inclut français, anglais, allemand, néerlandais, avec leurs diverses déclinaisons. Très expressive, avec son corps et son visage, Eugénie Rebetez ouvre généreusement les canaux de la communication. Accueillant les spectateurs dans une bulle intime, joyeusement mise en scène dans le sens de l’expressivité. Modulation de langues, du cri au chant en passant par des fragments en différents langages, Eugénie Rebetez danse autant par son corps que par sa voix. Dessinant des courbes vocales, des silhouette sonores presque visualisables.
Entre clown, burlesque et danse : un solo aussi intimiste que tourbillonnaire
Vêtue d’une petite robe blanche, Eugénie Rebetez court, saute, rampe. Pieds nus, déliée, elle enchaîne les mouvements, les tourbillons, les morceaux de phrases aux intonations caractéristiques. S’augmentant parfois de flotteurs qui lui font alors des hanches plus que callipyges. La question du corps y est omniprésente. Par ses gestes, sa danse bondissante et insatiable, Eugénie Rebetez déborde d’une énergie dévorante. Au corps fluet des danseurs classiques, elle oppose un corps giron. Mais il est facile aussi d’associer générosité, gourmandise et bienveillance à ce corps plantureux des femmes. Ne tenant pas en place, Bienvenue prend alors des allures de fuite. Bienvenue… à condition d’être capable de suivre cette cavalcade éperdue. Car Eugénie Rebetez met en scène un personnage qui ne cesse de se dérober, de changer de peau, de langue, d’intonation, de coloration émotionnelle, dessinant des paysages vibrants. Un joyeux défi à relever, pour clore la Biennale de la Danse 2018.