L’exposition «Ettore Sottsass designer du monde», organisée au château de Montsoreau, invite à mieux connaître un designer qui n’a cessé de s’interroger sur les rapports de l’homme à l’objet, et pour lequel «faire du design, ce n’est pas donner forme à un produit plus ou moins stupide pour une industrie plus ou moins luxueuse. Pour moi le design est une façon de débattre de la vie.»
Ettore Sottsass designer du monde
Ettore Sottsass est un créateur «polymathe» qui a su embrasser le design, l’art, la photographie, le dessin, et l’architecture. Convaincu de l’influence de l’objet sur celui qui le possède, il pu ainsi concevoir des objets ne se définissant plus seulement par leur fonction mais leur puissance d’évocation, leur capacité à susciter l’imagination.
C’est une telle conviction qui, certainement, a constamment aiguisé son insatiable curiosité, et l’a conduit à trouver de nouvelles sources d’inspiration au travers de ses voyages. Il découvre ainsi aux Etats-Unis, une société nouvelle, industrielle, utilisant de nouveaux matériaux, et une discipline comme le design industriel : «le décor de nos vies était fait de main d’homme : bois, plâtre, stuc, carton, étoffes. En Amérique, le paysage était un mélange complètement nouveau de matériaux extra-humains : cristal, chrome, aluminium. Un collage de produits industriels, de couleurs variées. D’où notre recherche, avec Memphis, de créer des rapprochements de textures quasi typographiques.»
Ce voyage aux Etats-Unis fut aussi l’occasion de découvrir le mouvement pop art et rencontrer le poète de la beat generation Allen Ginsberg, élargissant encore son intérêt pour l’art. Un autre voyage, en Inde, fut déterminant dans le parcours d’Ettore Sottsass puisqu’il y découvre une religion particulière pour laquelle la mort est un fait quotidien. Il y trouve matière pour concevoir deux séries de céramiques aux titres évocateurs, Céramiques des Ténèbres et Céramiques des Lumières, qu’il souhaite être des supports à la méditation et non de simples objets quotidiens.
Le design selon Ettore Sottsass
Ettore Sottsass conçoit le design dans son rapport étroit à l’art et au monde dans lequel il vit. Ainsi la notion d’artifice révèle-t-elle toute son importance puisque design et architecture sont des prolongements naturels de la vie de l’homme en société. On a pu le remarquer, l’idée de paysage artificiel est essentielle. Dès lors, la perception du monde environnant est première, et il importe de s’attacher à la lumière et aux couleurs, faits déterminant.
Il n’est donc pas étonnant de le vois se rapprocher au cours des années 1960, du mouvement de l’antidesign s’opposant au rationalisme et au fonctionnalisme du design industriel. Cette position contestataire, ou à tout le moins critique, le conduit à rassembler des designers italiens souhaitant redéfinir le design comme activité, en créant le groupe Memphis en 1981. Groupe dont les recherches renvoient par ailleurs au voyage initiatique d’Ettore Sottsass aux Etats-Unis, dans sa volonté de «créer des rapprochements de textures quasi typographiques.»
La collaboration d’Ettore Sottsass avec Olivetti, sur laquelle revient l’exposition, le fait connaître du grand public lorsqu’il conçoit la machine à écrire Valentine, à l’aspect ludique et pratique, inspiré du pop art : «Le résultat heureux d’une erreur. Devant l’arrivée de petites chinoises bon marché, on cherchait un modèle allégé (…) et puis on a eu l’idée de la couleur, on a choisi une belle matière, et ce fut un success.» Il crée notamment le premier ordinateur italien, Elea 9003, pour lequel il reçoit le prix Compasso d’Oro en 1959.