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ETC n°88 Faire avec

L’art aux abords de l’écologie tend aujourd’hui à ancrer ses visées novatrices dans un contexte pragmatique et limitatif. Adepte du «faire avec», cette mouvance artistique entend configurer un nouvel art d’habiter dont le champ d’action et d’ambition se restreint aux contingences du quotidien.

Information

  • @2010
  • 22-922607-88-7
  • \10€
  • E64
  • Zoui
  • 4français/anglais
  • }211 L - 298 H

Présentation
Sue Spaid, Sabine Himmelsbach, Caroline Loncol Daigneault, Jonathan Lachance, Pascale Pique, Claude Thérien, Timothée Chaillou, Claudine Hubert
ETC n°88 Faire avec

Faire avec la nature des choses
Bien qu’elle occupe une place grandissante au sein des propriétés collectives, la pensée écologique se trouve corrélativement confrontée, dans son application, à la complexité du monde contemporain et aux contingences particulières qui en découlent.

Délaissant quelque peu la visée grandiloquente de remanier la société dans ses fondements, l’écologie tend aujourd’hui à insérer ses enjeux dans les paramètres systémiques du moment -à travailler le système de l’intérieur-, notamment par l’usage de ses résidus excédentaires. Le recyclage, la récupération et la réutilisation prennent alors une ampleur qui dépasse la gestion résiduelle et la consommation d’énergie pour comprendre le détournement des traces culturelles en général.

Les projets artistiques qui répondent d’une pensée écologique se plaisent à saisir des occasions tandis qu’elles leur passent sous la main, et à extrapoler des idées grappillées dans le sillage de la culture populaire et la consommation de masse. L’esprit DIY (do-it-yourself) qui percole fréquemment à la surface de ces tactiques cherche à promouvoir les principes de débrouillardise, de polyvalence et de créativité personnelle par le transfert du savoir faire et de la pensée critique.

C’est la créolisation et l’expansion des possibles par le recyclage, le patentage et le rapiéçage tout autant que la résolution ingénieuse de problèmes épineux par des technologies sophistiquées remaniées à des fins alternatives. C’est aussi, dans bien des cas, l’ouverture de l’architecture, du design, de l’urbanisme et de l’ingénierie aux horizons non spécialistes d’une écologie inclusive du socius et pratiquée au jour le jour.

Ainsi, dans une veine plutôt ludique, le duo T&T (composé des artistes Tyler Brett et Tony Romano) tend à se projeter dans le futur, pour imaginer les germes d’une réorganisation sociale dans le calme post-traumatique de l’après-désastre écologique.

Entièrement configurés à partir des traces résiduelles d’un modernisme apparemment enseveli sous les décombres de ses actions passées, les environnements architecturaux de T&T communiquent une éthique autonomiste par leurs solutions patentées, ainsi qu’une résilience microtopique centrée sur l’acceptation du provisoire au jour le jour.

Sans tomber dans un ascétisme austère et réactionnaire, la rhétorique récemment promulguée dans divers projets éco-artistiques semble vouloir, par la restriction du champ d’action, réduire corrélativement l’empreinte écologique et reconnecter le champ d’expérience à un horizon d’attente jugé plus respectable -et atteignable- que celui des anciennes utopies mégalomanes.

Suivant leur diaspora environnementale, les nomades qui animent les paysages de T&T sont unis par la nécessité primordiale de développer des modes ingénieux d’adaptation sur fond de paysages profondément perturbés. Tels des chiffonniers de l’avenir, les troubadours et autres personnages quasi-médiévaux qui peuplent ces paysages de demain retapent de vieilles Camaro décaties et des dômes géodésiques en habitations précaires ou encore en réservoirs de biogaz.

Les oeuvres graphiques de T&T reprennent donc des clichés culturels pour en faire des motifs d’arrière-garde écologique dans un monde post-consommatoire, où ils deviendraient autant de vieilles camelotes recyclées à un usage doucement utopiste.

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