Éric Poitevin
La Galerie Nelson-Freeman présente la seconde exposition personnelle d’Éric Poitevin. Depuis une vingtaine d’années, Éric Poitevin revisite à travers la photographie les différents genres de l’histoire de l’art: paysage, nature morte, portrait, nu. Il constitue ainsi des ensembles qu’il arrête et reprend à son gré.
Qu’il s’agisse d’êtres humains, d’animaux ou de végétaux, l’artiste travaille selon une même démarche: dépouiller son sujet de tous ses artifices. L’absence d’expression, le cadrage serré, la lumière diffuse, le fond monochrome contribuent à offrir un point de vue le plus neutre possible.
Chaque photographie se veut l’affirmation, d’un moment suspendu dans le temps. À première vue silencieuses, ses photographies instaurent malgré tout un dialogue avec le spectateur — c’est là toute la force paradoxale de ce travail. Par le choix de ses sujets (la forêt, l’animal, le corps dénudé), Éric Poitevin joue avec notre imaginaire collectif (ses peurs, ses fascinations, ses désirs).
Pour cette nouvelle exposition, Éric Poitevin prolonge son travail sur le corps en nous proposant au rez-de-chaussée une série de portraits et de nus féminins et masculins. Des corps allongés, de dos ou en buste s’offrent comme des paysages à la vue du spectateur. Malgré l’acuité des détails et l’abandon des poses, il n’y a rien ici de médical ou de voyeuriste.
Également présentes, deux natures mortes de moyens formats, un congre et un agneau, font directement référence à la peinture. L’agneau s’inspire de l’Agnus Dei de Zurbarán (1598-1661). À l’origine l’animal blanc aux pattes liées est allongé sur une table noire. Chez Éric Poitevin, l’agneau est noir et est présenté sur un socle devant un fond blanc. L’inversion semble fonctionner comme un négatif. Le geste photographique devient le révélateur. L’agneau offert en sacrifice se libère de ses liens et entre en mouvement.
Sont présentes également un ensemble de natures mortes: des photographies de crânes de moyens formats. Présenté sur socle, sans autre ornement, le motif s’inscrit ici encore, dans l’histoire de la peinture.
A l’étage, l’artiste montre un ensemble de deux photographies noir et blanc en deux parties de très grand format. Des entrelacs de branches torturées se découpent sur un ciel blanc d’hiver. De la neige recouvre les branchages accentuant l’impression d’austérité. Cinq photographies de grands formats leur font face. Des chemins se dessinent qui sont des percées, des respirations dans une forêt de la Meuse. Le regard est guidé vers la lumière qui se distingue au loin. La prise de vue est frontale mais rarement dans les oeuvres d’Eric une perspective se dégage si nettement.
critique
Eric Poitevin