La Rolls Royce Corniche de 1984 est, sur la proposition d’Eric Cantona, passée depuis entre les mains de l’artiste américain JonOne, graffeur mondialement reconnu.
Ce dernier a graffé la Rolls qui a ensuite été mise aux enchères par la maison Artcurial au cours de la vente Art Urbain contemporain dédiée à l’art de rue, qui proposait le 22 janvier 2013, des œuvres de street artistes comme Keith Harring, Invader, Shepard Fairey ou encore Banksy.
Mise à prix à 20 000€, la Rolls fut enlevé à 125 000! Au profit, donc de la Fondation L’Abbé Pierre, qui avait déjà annoncé que cette vente participerait au financement des programmes «SOS Taudis», destiné à transformer 600.000 logements indignes, «Toîts D’abord», voué à la construction de logements sociaux, et «Boutiques Solidarité», lieux d’accueil de jour pour les personnes à la rue.
Au-delà des divergences d’appréciation de l’œuvre de JonOne chez les amateurs de Rolls ou de Grafs –les premiers frisant l’apoplexie face à l’injure perpétrée sur une Rolls de ce prestige, les seconds regrettant le style «old school» de JonOne, plus proche pour eux d’un travail de débutant que de celui d’un artiste de son pedigree– nous relèveront l’ironie de ce glissement d’un monde à l’autre.
Ex-footballeur et voiture d’hyper luxe s’acoquinent –d’aucuns diront par mauvaise conscience– avec le monde de l’humanitaire en passant par la grâce d’un artiste labellisé street-art mais depuis longtemps défendu en galerie et dans toutes les plus hautes sphères du monde de l’art et de l’argent.
Cette circulation hyper-luxe-Street-art labellisé-humanitaire surprend en France mais reflète un système somme toute très anglo-saxon, voire plus encore, américain.
Un système où l’état ne joue traditionnellement pas le même rôle qu’en France, ni la culpabilité ou la transparence des actes de chacun d’ailleurs, et laisse aux fondations et au système du found-raising une place tout autre.
Mais rassurons les esprits chagrins, et si cette circulation d’un monde à l’autre ne manque pas d’intérêt, rappelons que JonOne, né américain mais vivant en France depuis de longues années, n’en est pas à son premier coup d’essai avec la fondation Abbé Pierre.
En effet, en 2011, pour l’anniversaire du décès de son fondateur il réalise un portrait à son effigie dans un square parisien du 18ème arrondissement inauguré par le maire de Paris et en 2012, il signe une fresque dans un restaurant social de Metz.
Quant à Eric Cantona, son engagement citoyen est, depuis longtemps, connu de tous. Souhaitons lui de continuer à l’affirmer, qu’elle qu’en soit les raisons. Et arguons qu’un jour, si la tentation lui prend, peut-être continuera t-il à l’honorer, cet engagement, même sous d’autres cieux, pour le grand plaisir des fondations belges ou suisses.