ART | EXPO

En torrent et second jour

01 Avr - 24 Mai 2014
Vernissage le 31 Mar 2014

Une recherche méthodique de ce qui fait un artifice, sur l’écran ou en dehors. Des œuvres vidéo qui réassemblent le dispositif cinématographique pour produire de nouvelles continuités. Cette exposition travaille une idée de réalisme et de mimesis où figures et fonds, messages et interfaces servent de camouflage les uns aux autres.

Neïl Beloufa
En torrent et second jour

Les œuvres vidéo de Neïl Beloufa ne déconstruisent pas tant les conventions filmiques qu’elles ne les défont, démontant puis réassemblant le dispositif cinématographique pour produire de nouvelles continuités. Ses personnages habitent des décors à l’existence précaire, conçus pour faire obstruction aux mouvements de la caméra ou pour les prolonger plutôt que pour accueillir des récits de transformation.

Panoramiques, dialogues, gestes ébauchés, scénographies découpées en segments ou clonées se fictionnalisent mutuellement, jusqu’à s’exhiber cinématographiquement. C’est la réponse de l’artiste à notre attente de moments forts, dans sa recherche méthodique de ce qui fait un artifice, sur l’écran ou en dehors. Cette logique de démantèlement s’étend aux environnements que Neïl Beloufa construit autour de ses images animées, montage de traductions sculpturales et d’équivalences instables, d’images fixes prélevées sur un processus de création, qui évoque son recours aux techniques et aux récits de la vidéo.

Dans le projet de l’artiste pour la Fondation d’entreprise Ricard, les éléments mis en relation par l’installation (les «salles de projection» si frustrantes de Neïl Beloufa, avec leur structure en labyrinthe, ou encore ses making-of sculpturaux, dérangeants par leur réalité palpable) voient leur syntaxe et leur fonction retournées. Jamais en phase avec leur statut d’accessoires, ces objets seront activés et documentés, déplacés et «animés»; il leur sera permis de se développer au delà des distinctions admises de figure, de fond et d’importance. Leur usurpation d’une position centrale sur scène intensifie et souligne leur place ambiguë entre fonctionnalité et obstruction. L’interface incarne le rôle du protagoniste, qu’elle s’est d’abord appropriée. Nous avons là l’inverse d’une situation à la Pygmalion, d’une statue prenant vie, dans un écho aux anxiétés modernes autour d’un complot des écrans qui envahiraient peu à peu les corps et les âmes des spectateurs.

Neïl Beloufa se livre aussi à des expériences d’animation avec cette vibration hypertrophiée d’images, projetées ou montrées, où le cadre ne se distingue plus de ce qui est cadré.

«En torrent et second jour» travaille une idée — assez indémêlable — de réalisme et de mimesis où figures et fonds, messages et interfaces servent de camouflage les uns aux autres. L’équation mimétique, qui tenait ensemble les films et les assemblages sculpturaux conçus très clairement pour les regarder, se transforme en une autre mimesis, plus large et plus abstraite. Cette dernière met en relation images instables et utilisateurs incertains, à la lutte pour le sens, et se vidant réciproquement du temps.

Mihnea Mircan, février 2014

Vernissage
Lundi 31 mars 2014 à 18h30

critique

En torrent et second jour

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