Les travaux exposés dans cette exposition peuvent être rattachés à trois classes : les bijoux, les machines (Fliessband et Star System) et les signaux (Strap Paint).
Les machines comportent des tapis roulants et des lames tranchantes en étoiles montées sur des axes rotatifs. L’œuvre Star System, présentée à l’entrée, est une cage en inox à l’intérieur de laquelle ont été montées des rangées de lames aiguisées.
Exposée au centre de la première salle, l’œuvre Fliessband rassemble plusieurs tapis roulants en caoutchouc, dont les moteurs, visibles, laissent imaginer que les machines pourraient fonctionner.
Aux murs, les Strap Paint correspondent à des rectangles rouges en bois au centre desquels ont été intégrées des bandes en aluminium. Ces signaux dessinent au mur des formes de blasons rougeoyants.
Dans la petite salle de la galerie, plus intimiste, les bijoux en argent, de dimensions diverses, se rapprochent de dés à coudre, de poinçons et de poings américains.
Suspendue au plafond par une corde, l’œuvre Christmas Tree, arbre renversé en inox, présente au visiteur des pointes aigues et tranchantes, évoquant une arme de torture.
Ces objets sont exposés, dans leur sens littéral: ils sont soustraits à toute utilisation, à leur fonction. Pour autant, mis en réserve, ils placent le psychisme des spectateurs dans un état de latence.
Les œuvres de Fabrice Gygi jouent ainsi sur l’ambivalence. Les machines Fliessband et Star System suscitent certainement chez les spectateurs des angoisses terrifiantes (broyage et découpage des matières ou des corps), mais en elles-mêmes ce sont des objets métalliques rutilants. Les bijoux, symboles de luxe et d’esthétisme, renvoient à des objets techniques étrangement façonnés qui semblent pouvoir meurtrir les corps. Le signal des Strap Paints semble menaçant: on pourrait y accrocher ou arrimer des êtres et des choses. Pour autant, les Strap Paints dessinent de simples blasons rouges aux murs.
Le travail de Fabrice Gygi ne vise pas l’harmonie, mais la tension, renforcée par les choix de tonalités des œuvres, métalliques, noires et rouges. Il révèle un univers où l’oscillation entre deux réalités ambivalentes crée une énergie tendue. Les objets sont inactifs, mais ils s’adressent au spectateur dans leur dimension de fétiche, de symbolique, dans tout le potentiel de séduction et de fantasme de leurs fonctions, interrogeant puissamment les affects profonds des individus.
Fabrice Gygi
— Star System, 2008. Inox. 200 x 162 x 149 cm.
— Strap paint, 2009. Aluminium, bois, polyester. 180 x 280 cm.
— Grand Lino perdu, 2008. Linogravure sur papier velin. 160 x 120 cm.
— Christmas Tree, 2009. Inox, corde. 138 x 77 x 77 cm.
— Fliessband, 2008. Aluminium, caoutchouc, acier, moteurs. Dimensions variables.