L‘exposition «Emptiness, Violence & Valleys» fait suite aux expositions de Johannes Wohnseifer présentées au Sprengel Museum de Hanovre en 2003 et à la galerie Casey Kaplan à New York en 2008.
Dans la première salle de la galerie principale (rue Louise Weiss), quatre peintures de grande dimension sont exposées. Le procédé de fabrication de ces peintures est singulier: il s’agit de peintures murales de couleur, recouvertes de plaques d’aluminium perforées.
La première pièce visible à l’entrée se divise en deux parties horizontales: la première bande est bleue clair, la seconde bleue gris. Une autre pièce se compose de trois bandes horizontales: l’une est marron, la seconde rouge, la troisième violette. Une troisième pièce décline des teintes du vert jusqu’au marron, selon une composition verticale.
Les titres de ces pièces font chacune référence à l’idée de paysage: Sea, Forest, Desert et Sunset, mais les peintures fonctionnent aussi comme des abstractions colorées.
Dans la seconde salle de la galerie principale, une série de portraits, sept au total, sont exposés. Réalisés en Allemagne entre 1933 et 1945, c’est-à -dire pendant la période nazie, ils semblent former un portrait de famille évoquant l’Allemagne aryenne.
Les portraits sont ceux d’hommes en uniformes militaires ou d’enfants blonds joufflus. La femme portraiturée tient d’une main pâle, ornée de bijoux, un livre à la reliure sobre, composant l’image de la féminité bourgeoise. Installées sous des caissons de plexiglas jaune fluorescent, ces portraits académiques, référant aussi au consumérisme, se chargent d’une légèreté paradoxale, car empreinte du passé traumatique de l’Allemagne. L’artiste semble ainsi attenter à la vision idéale et lyrique de l’Allemagne.
Dans la même salle, un ensemble de cinq sculptures représente des modèles topographiques de vallées. Creusées dans des socles blancs, socles d’expositions, ces formes de vallées se référent à la notion de paysage tout autant qu’au vide des modèles économiques. En allemand, le terme désignant la vallée renvoie également à la partie basse du cycle économique. L’artiste convoque ainsi à nouveau l’image bucolique de l’Allemagne pour mieux la détourner, instaurant un double langage.
Une série de dessins, photographies et collages reprenant les thèmes de l’exposition est exposée dans le deuxième local de la galerie, rue Duchefdelaville.
Un premier cadre fonctionne autour du mot «Spider». Il s’agit en fait de l’interprétation d’une carte de visite découverte par l’artiste, de manière aléatoire.
Un second cadre s’articule autour du dessin de la pyramide de Kheops. Cette reproduction de la pyramide aborde, à la manière des portraits nazis, le thème du temps élastique, de même qu’elle fixe une époque précise. Dans ce même cadre figure une vignette photographique, représentant un couple en sous-vêtements. Le cadre réunit la froideur du plan d’architecture et la notion d’intimité, donnant la part belle aux principes d‘accumulation et d‘entrecroisement.
Sur une toile blanche, le visiteur peut lire en grandes lettres noires «Chess Ace, Chase Ass». Ces mots font référence à une photographie qui met en scène Marcel Duchamp jouant aux échecs avec le modèle Eve Babitz nue.
Au final l’artiste semble proposer des lectures multiples des paysages, images et portraits, offrant une vision kaléidoscopique de l’Histoire et de ses mythes.
A noter: dans une pièce adjacente au local, Johannes Wohnseifer présente la collection complète de ses livres d’artistes, catalogues et publications.