Chorégraphe israélien installé en France depuis 2007, Emanuel Gat gère également la scénographie, la lumière et les bandes sonores de ses spectacles. L’enjeu de Works est cependant de remettre en question l’omniprésence du chorégraphe dans le processus artistique. Issu de la collaboration entre le Ballet de Lyon et l’Emanuel Gat Danse Compagny, le spectacle revient sous une nouvelle forme, interprétée par les seuls danseurs du chorégraphe.
Works : un foisonnement chaotique réglé au millimètre près
Works décontenance d’entrée de jeu. Une dizaine de danseurs se meuvent sur scène, exécutant chacun une chorégraphie différente, sans cohérence collective apparente. Le corps de ballet semble également dépareillé dans les costumes : une interprète en justaucorps danse à côté d’un homme portant T-shirt troué, bermuda et bonnet ; un danseur arbore une jupe pendant qu’un autre est en jogging ou en sous-vêtements.
Par delà l’impression de chaos qui se dégage ainsi, ce foisonnement intervient dans un cadre bien précis. D’abord, le spectacle alterne méthodiquement entre danse d’ensemble et duos, entre musique enregistrée et musique jouée en direct. Ensuite, au sein même de chaque partie de Works, les interprètes s’échangent parfois des chiffres ou des mots pour signifier l’ouverture d’une nouvelle phase chorégraphique.
Works : chorégraphie ou improvisation ?
La littérature explore à travers la technique du « flux de conscience » le monologue intérieur des personnages, en suivant le fil de leurs pensées jusque dans leur incohérence. Works déroule un véritable flux de conscience chorégraphique dans lequel l’expression individuelle et l’improvisation des danseurs conduisent le spectacle. Des électrons libres se déplacent et interagissent entre eux de façon sans cesse renouvelée.
Emanuel Gat joue un rôle de chef d’orchestre. Il définit les directions et formule les indications générales, les bases chorégraphiques et les musiques, mais les danseurs s’en emparent librement. La limite entre chorégraphie et improvisation est ainsi volontairement brouillée. Emanuel Gat valorise la virtuosité et la singularité des danseurs, tout en remettant en question la hiérarchie entre le chorégraphe et les interprètes dans le processus créatif.