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Ellipse/Éclipse

La galerie est éclairée d’une lumière clinique, aux néons blancs. Une lumière crue qui présente sans détour des œuvres apparemment sans beauté artistique. Les travaux présentés ne sont toutefois pas ceux de physiciens, ils ne démontrent pas des vérités scientifiques, mais exposent un processus, un résultat de la nature aux allures magiques et impalpables. Ils créent un lien entre l’homme et la matière, entre ce qui dépasse l’humain et ce qui fait son essence et son mythe primitif personnel.

Vadim Fiskin présente Ping Pong Electronic, une construction qui recrée le phénomène de gravité terrestre avec de simples objets du quotidien, deux sèches-cheveux placés à chaque extrémité d’une rampe se renvoient une balle de polystyrène.
L’installation évoque le mythe de Sisyphe, sa peine assignée de remonter le rocher au haut de la colline pour le voir rouler la pente éternellement, et l’espoir de le ramener chaque fois renouvelé. Comme un clin d’œil fait à notre condition humaine, luttant vainement contre la physique.

Les œuvres d’Evariste Richer sont, elles, des constats esthétiques face au travail du temps sur la nature, par une collecte d’objets pétrifiés ou magnifiés par le temps (avec les quatre pierres semi-précieuses de CMYK). Par une réflexion sur la beauté échappant à l’homme et à ses actions, Évariste Richer se pose en contemplateur.

D’une œuvre à l’autre, une poésie se fait perceptible, elle raconte non pas la Science et les grandes découvertes mais des phénomènes très ciblés, et des formes qui jouent avec les perceptions optique et artistique.
Avec Spherical Vortex, Attila Csörgö photographie le déplacement de la lumière. Un exploit technique ? Non, un simple arrêt sur image d’un phénomène visible à l’œil nu. Une lampe tournant sur elle-même produit des faisceaux de lumière qui créent une sphère, petite planète impalpable. Ces œuvres jouent avec les notions de sublime, en tant que productions dont la signification profonde semble dépasser l’entendement.

La deuxième œuvre d’Évariste Richer crée un pont, ou plutôt une ligne verticale, entre la terre et le ciel. Elle est l’objet-lieu, entre la roche (matière pérenne, vivante et belle) et la foudre (phénomène électrostatique, incontrôlable, sublime). Son œuvre lie deux durées et deux espaces, la belle lenteur, la mémoire du passé, avec la carapace de tortue fossilisée, et la fugacité du temps présent, son pouvoir de destruction instantanée avec la tige cuivrée — qui s’élève du fossile —, conducteur d’électricité par excellence.

Entre phénomènes physiques purs, concrètement identifiables et objets esthétiques jouant avec les limites du magique, les œuvres présentées chez Scleicher + Lange appellent à une nouvelle forme de promenade : la rêverie scientifique.
C’est d’ailleurs une promenade autour du monde que nous propose l’artiste suédois Alexandre Gulke, avec Universe. Il projette le mot «universe» sur un carrousel en rotation perpétuelle. L’œuvre prend le mot au mot, et crée un espace langagier et lumineux quasi tautologique…

L’exposition est un jeu sur les notions de compréhension pragmatique et de recréation fictionnelle, dont le fil conducteur pourrait être la lumière, apparaissant puis disparaissant. Ellipse/Éclipse.

Liste des oeuvres (non exhaustive)
— Attila Csörgö, Spherical Vortex, 1999. Tirages photographiques Iflo-flex. 42 x 42 cm chacun.
— Vadim Fiskin, Ping Pong Electronic, 2007. Dispositifs, structure en bois, métal, balle en polystyrène, sèches-cheveux, fils électriques. 200 x 23 x 42 cm.
— Alexandre Gulke, Universe, 2008. Ready-mades, projecteur Dias, 81 diapositives, dimensions variables.
— Goran Petercol, Symmetries I, II et III, 2009. Dessins, crayon, encre de Chine sur papier découpé. 46 x 34 cm chacun.
— Évariste Richer, CMYK, 2009. Installation, quatre pierres semi-précieuses à l’état brut. Dimensions variables.
— Évariste Richer, En attendant la foudre, 2009. Installation, tige cuivrée, tortue fossilisée. 315 x 22 x 22 cm.

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