L’exposition « Eli Lotar » au Jeu de Paume est la première rétrospective de l’œuvre de ce photographe et cinéaste, dont la pratique photographique marqua les années 1930.
Le paysage urbain et industriel parisien : terrain de jeu d’Eli Lotar
La richesse documentaire de l’exposition permet de rendre compte de toute l’étendue de la créativité d’Eli Lotar, de la photographie au cinéma. On découvre plus de cent tirages d’époque, mais aussi des images inédites qui sont des photographies reproduites à partir d’un fonds de négatifs, des films, des négatifs et divers documents tels que des reproductions d’articles de journaux et de pages de revues illustrées.
Le parcours n’est pas organisé de façon chronologique mais en cinq sections thématiques qui témoignent de la variété de sujets abordés par Eli Lotar au cours de la période la plus productive de sa pratique photographique, de 1927 à 1932. Le paysage urbain et industriel parisien est une des sources d’inspiration favorites d’Eli Lotar comme le montre ses clichés réalisés en 1929 aux abattoirs de la Villette dont celui, célèbre, intitulé La Viande, et capturant l’image de quatre sabots de veaux alignés. Il trouve dans cet environnement urbain et les récentes inventions modernes comme les bateaux, les avions, les trains, rails et signaux ferroviaires, des motifs propices à sa pratique avant-gardiste.
Une œuvre entre réalisme documentaire et lyrisme surréaliste
Les clichés d’Eli Lotar s’inscrivent dans le langage de la photographie moderne européenne initiée par Man Ray, André Kertesz ou encore Germaine Krull. Les détails sont mis en valeur par des effets de gros plan, plongées, contre-plongées et décadrages. Les points de vue sont variés et parfois surprenants comme les photographies de pas saisies au dans la foule visitant la Foire de Paris en 1928, à l’aide d’un appareil à main Ermanox.
L’œuvre d’Eli Lotar, entre tradition du reportage documentaire et avant-garde surréaliste témoigne d’un engagement social et politique. Le photographe entendait offrir un nouveau regard profondément ancré dans la réalité. Son intérêt pour les sujets sociaux s’exprime à travers ses reportages à l’hôpital des Quinze-Vingt dédié aux mal-voyants, à l’Institut des sourds-muets ou encore parmi les prostituées parisiennes. Il s’exprime également dans des réalisations cinématographiques puisque, dès 1929, Eli Lotar, attiré par ce médium, collabore à des films documentaires comme Terre sans pain de Luis Buñuel, consacré à la vie miséreuse des habitants de la région des Hurdes, en Espagne.
critique
Eli Lotar