Camille Henrot
Égyptomania
Camille Henrot «Égyptomania» est présentée à la galerie Kamel Mennour du mardi au samedi, de 11 à 19h.
« Ma pratique envisage l’art comme une forme d’anthropologie personnelle dans laquelle le rapport entre le général et le particulier – et à travers lui la question du rapport au temps – est centrale. » Camille Henrot.
À la manière d’une géologue ou d’une archéologue, Camille Henrot décortique la culture – sa matière première – par strates et par couches successives. Loin de vouloir rationaliser les choses, Camille Henrot, complexifie notre rapport au monde en travaillant par prolongement, superposition et recyclage comme pour conjurer l’angoisse de l’effacement.
Ainsi la série Room Movies mais aussi Courage mon amour dévoilent un désir de résistance par rapport au temps, tandis que King Kong Addition survit au brouillage visuel et à sa disparition annoncée. Son film le plus récent, réalisé autour de la personnalité de Yona Friedman, Film Spatial, cherche quant à lui à nier l’espace et ses temporalités.
Pour sa première exposition personnelle à la galerie Kamel Mennour, Camille Henrot, présente un ensemble d’oeuvres inédites mêlant dessins, film et sculptures. Situé dans les profondeurs de la galerie, le Tevau – objet rituel de Nouvelle Calédonie – est ici revisité à travers un autre talisman contemporain: la lance à incendie. Si la forme de cet objet enroulé évoque l’échange et la réciprocité, la torsion entre les deux bobines indique que les deux volumes sont bien de même valeur.
Avec cette lance à incendie métamorphosée en Tevau, l’artiste nous rappelle le caractère rituel de certains objets modernes ainsi que la résurgence du primitif dans nos cultures occidentales. Au rez-de-chaussée, l’installation Hauts Reliefs et la projection Cynopolis nous transportent en Egypte sur le site de la première Pyramide à Sakkarah.
Composée de 13 sculptures en plâtre et en grès, Hauts Reliefs initie un dialogue original entre sculpture et sac plastique, Histoire et anecdote, pérennité et quotidien, tandis que le film Cynopolis, projette les images de ce site historique en activité. Concentrée sur un groupe de chiens errants, la caméra de Cynopolis filme alternativement ouvriers, touristes et animaux.
Le chien, considéré dans la mythologie égyptienne comme le passeur du monde des vivants vers celui des morts, incarne ici le retour à l’état sauvage de ce que l’homme a voulu domestiquer, la nostalgie d’un état antérieur, à l’image de ce paysage en décomposition où la pyramide redevient montagne.
Ainsi entre volonté de mémoire et d’oubli, réel et imaginaire, matière et abstraction, cette exposition pose les fondements d’une problématique récurrente dans le travail de Camille Henrot á savoir celle de l’élasticité des produits culturels ou encore la tendance inhérente à toute chose à retourner naturellement à l’informe.