Pierre Buraglio
Echos de 14-18. Son enfance, sa Normandie
Dans le cadre des commémorations de la Grande-guerre le musée de Louviers présente une exposition d’œuvres de Pierre Buraglio en écho à 14-18.
Pierre Buraglio, proche du mouvement Supports/Surfaces, a voulu se débarrasser des instruments traditionnels de la peinture et a refusé de succomber à l’idée qu’une œuvre est uniquement le fruit d’un savoir-faire hérité de la seule tradition picturale. Dans le sillage des grands mouvements artistiques qui ont vu le jour dans la première moitié du XXe siècle, il se devait de déconstruire la peinture, d’en démonter tous les rouages, pour l’aborder de façon nouvelle. Son histoire c’est aussi celle d’une génération qui a vu le jour en même temps que la Seconde guerre mondiale. Une guerre qui a laissé des traces indélébiles dans sa conscience et lui a permis d’ouvrir les yeux sur cette folie meurtrière et l’importance du jeu politique.
Invité par l’Historial de la Grande-guerre de Péronne en 2011, Pierre Buraglio s’est intéressé aux objets abandonnés par les soldats sur les champs de batailles. Son regard sur ces combats prend la forme d’un dialogue entre soldats des deux camps, engagés malgré eux dans une spirale funeste. Ses œuvres, en résonnance avec ces reliques mémorielles, questionnent l’Histoire. Traces de vie et de mort, absurdité conflictuelle, sacrifice d’une jeunesse sur l’autel du patriotisme et du nationalisme, toutes ces questions sont abordées dans les pièces réalisées à cette occasion. Cette guerre industrielle et chimique montre les limites de l’homme devenu chair à canon, quantité négligeable. Mais, il demeure pourtant férocement vivant à l’image du poète Guillaume Apollinaire, blessé à la tempe en 1916 dans les tranchées près de Verdun, dont Pierre Buraglio nous montre la tête bandée.
Cette exposition au musée de Louviers, met en exergue la relation particulière de Pierre Buraglio avec les deux premiers conflits mondiaux. Enfant de la guerre, il y sera confronté dès sa plus tendre enfance. D’abord à travers sa propre famille, son père sera prisonnier et ses oncles incarneront, pour l’un, le Républicain militariste et l’autre l’anarchiste. Puis, les souvenirs de rationnement et des tickets «J1», réservés aux jeunes enfants, qui resurgiront dans sa mémoire à travers les souvenirs maternels. Et puis encore, le père architecte qui participera à la Reconstruction en Basse-Normandie.
L’exposition regroupe plus de soixante dix pièces, dessins, peintures, montages divers, photographies et documents illustrant les deux guerres mondiales et la Normandie.
L’œuvre de Buraglio est mnémonique. Il rassemble, juxtapose, réemploie, agrafe, met en conversation des éléments, questionnant ainsi la construction de la mémoire pétrie d’une multitude d’expériences sensibles, de souvenirs réels et inventés.