Daniel Arsham
Easter Island
La collection «Travel Book» éditée par Louis Vuitton invite au voyage, qu’il soit mobile ou immobile, nourri du plaisir de l’évasion intellectuelle ou émotionnelle. Au fil des pages, les œuvres d’artistes de renom et de jeunes talents racontent les villes et les pays parcourus, leurs chemins escarpés et leurs architectures rectilignes, les lumières, les jours et les vies qui s’y déploient. Les «Travel Books» proposent une nouvelle vision du départ.
Enfant, Daniel Arsham rêve de bâtir des villes, des constructions impossibles, des paysages futuristes, des hypothèses. Le jeune Américain, né en 1980, intègre alors l’Union Cooper de New York, une école d’art et de design dotée d’une section en architecture et ingénierie. Cette confluence d’univers lui permet d’explorer d’autres vocabulaires. Il en tire des gouaches oniriques, dont la technique et le sujet puisent leurs racines dans l’illustration urbaniste: l’usage de film Mylar, l’aquarelle, le souci des perspectives et des vibrations de la lumière…
Arsham imagine une cosmogonie en touches de gris et de noirs, un monde mélancolique composé de ruines monolithes, parfois perdues sur des îles soufflées par des tornades apocalyptiques. Son trait cite les canons de l’Antiquité et de la Renaissance, les gravures dramatiques de Piranesi ou l’épure radicale du Modernisme. L’artiste construit ainsi son propre langage. Puis ses images d’architecte glissent du papier vers la réalité, pour interroger la surface des choses, éroder les structures qui l’entourent, les déconstruire, les remodeler. Ses sculptures en fibre de verre blanc s’emparent des murs, les étirent, les drapent, les éclatent. Et la gouache, toujours, de répondre aux expérimentations de la matière par la netteté de son trait et la précision de ses détails.
Cet énigmatique projet artistique a très tôt suscité l’intérêt des institutions et des figures de l’art, comme Bonnie Clearwater, directrice du MoCA de Miami, Hedi Slimane, alors créateur de Dior Homme, ou le chorégraphe Merce Cunningham — qui lui demande de scénariser «eyeSpace», une création pour laquelle Arsham pense l’espace comme une performance éphémère.
À travers son studio Snarkitecture, il travaille aussi à la conception d’environnements où s’interpellent l’art, l’architecture et le design. L‘œuvre pluridisciplinaire de Daniel Arsham se nimbe du mystère des ruines et des civilisations disparues avant de se projeter soudain dans le futur. À la manière d’un architecte, devenu archéologue.