Présentation
Philippe Sers
Duchamp confisqué, Marcel retrouvé
Très tôt Marcel Duchamp a voulu procéder à la publication systématique de son travail dans une sorte de musée portatif qui est la Boîte en valise. Cette œuvre clôt ce qu’il est possible de dénommer le Grand-CEuvre de Marcel Duchamp et appelle l’interprétation à un renouvellement radical. L:essai de Philippe Sers a pour objet de suivre la trame secrète qui unifie ce Grand Œuvre, et qui n’a que peu de rapport avec le nominalisme relativiste vers lequel on a voulu le tirer artificiellement.
L’apport de la réflexion de Marcel Duchamp ne réside pas dans la faculté que s’accorde l’artiste d’opérer la promotion du n’importe quoi au rang d’objet d’art. C’est l’acception même de la notion d’œuvre d’art qui est radicalement bouleversée. Son expérience le conduit à changer d’attitude vis-à -vis de l’œuvre d’art: elle n’est plus valorisée en elle-même mais considérée comme un moyen privilégié d’accès à la réalité vitale.
La force de cette étude est de démontrer, à partir d’une interprétation nouvelle du travail et de la pensée de Duchamp, que contrairement aux idées reçues ils reconduisent l’attention sur le plus iniportant- – la démarche— vérific-atiice de l’artîste pour lequel la teneur de vérité de l’œuvre d’art est indissociable de la discipline que lui imposent les conditions de l’activité artistique. L’autonomie de l’artiste, que Duchamp réaffirme, n’a pas en elle-même sa propre fin, mais fonde la radicalité de la création avant-gardiste.
Une enquête réalisée par l’auteur en 1976 sur Duchamp auprès des artistes, et personnalités de l’art – « témoins » ou plus jeunes – telles que Carl Andre, Joseph Beuys, Daniel Buren, Pierre Cabane, John Cage, Christo, jean Clair, Salvador Dali, Robert Lebel, Julio le Parc, Man Ray, Nicolas Schâffer, Arturo Schwarz, Tinguely, Andy Warhol, vient clore cet essai qui propose une réinterprétation de l’entreprise de Duchamp, libérée de l’incidence qu’elle a eue sur l’art contemporain.