Esthétique sonore et esthétique plastique se côtoient chez nombre d’artistes contemporains. Après avoir évoqué la poésie «sonore et visuelle» de Bernard Heidsieck et Ketty La Rocca, Jacinto Lageira, commissaire de cette série d’expositions chez Fabienne Leclerc, poursuit sa réflexion sur ce thème avec sept artistes d’origines diverses, abordant le son ou le langage comme des matériaux en soi.
On retrouve ainsi, par Bernard Heidsieck, les poétiques collages d’éléments électroniques sur papier sérigraphié, qui donnent une seconde vie esthétique à ces matériaux du rebut technique. Le support même du son est évoqué par l’œuvre plastique du compositeur Jean-Jacques Palix, intitulée 16’33’’ (2007) : l’alignement de trente-trois 33 tours accompagné d’un disque de «33 hommages de 30 secondes à 33 compositeurs» fonctionne comme un monument aux héros du son.
Au sous-sol, plusieurs vidéos permettent de constater l’importante avancée qu’a permis ce médium dans l’élaboration d’un art alliant réellement, et non plus par des correspondances subjectives, le son, le langage et les formes.
The Waves (2005), du duo d’artistes brésiliens Angela Detanico et Rafaël Lain, est à ce titre éloquent : à partir d’un même signe défilent à grande vitesse des textes ayant pour point commun ce signe qui, isolé, n’a de sens que graphique.
Happenstance (Part One of Many Parts) (1982-1983) et Tale Enclosure (1985) de Gary Hill, ou Reversed Mirror (1997) d’Eduardo Kac, montrent les premières expérimentations menées sur le support de l’écran comme lieu de l’avènement des mots, formes plastiques malléables à l’infini.
Eduardo Kac, artiste brésilien qui fut l’un des pionniers de la musique électronique, travaille aussi sur le mot et ses modes d’apparition dans deux «holopoèmes». Dans Andromeda Souvenir (1990) et Astray in Deimos (1992), le mot, formé en hologramme, est perçu par intuition, comme une révélation. La série Lagoglyph (2006-2007) joue aussi sur ce jeu de la révélation et du déchiffrage : la suite de glyphes inventés par l’artiste se présente comme un alphabet imaginaire, et expose un nouveau langage.
Jean-Jacques Palix
— 16’33’’, 2007. Pochettes de disques vinyles 33 tours, étiquettes imprimées. 191 x 191 cm.
Eduardo Kac
— Erratum 1, biotope, 2006. Biotope. 48,2 x 58,4 cm.
Anne-James Chaton
— L’artiste, 2005. Portrait. ART3, Valence. Affichage dans les rues de Valence du 5 novembre au 17 décembre 2005. (1,76 m x 1,20 m) x 4.
Angela Detanico et Rafaël Lain
— The Waves, 2005. NTSC vidéo couleur silencieuse. 32’’.
Eduardo Kac
— Sans titre (de la série Lagoglyph), 2006-2007. Encre sur papier. 30 x 40 cm.
— Andromeda Souvenir (Souvenir d’Andromède), 1990. Holopoème. 30 X 40 cm.
— Astray in Deimos ( Égaré en Deimos ), 1992. Holopoème. 30 X 40 cm.
Bernard Heidsieck
— Sérigraphie + collage H/C (cercle « That Is The Question… »), 1990. Sérigraphie et collage sur papier, encadré. 69,3 x 59,3 cm.
— Sérigraphie + collage H/C (« Vraiment vous… »), 1990. Sérigraphie et collage sur papier, encadré ; 69,3 x 59,3 cm.
— Sérigraphie + collage H/C (« Je me… »), 1990. Sérigraphie et collage sur papier, encadré ; 69,3 x 59,3 cm.
— Sérigraphie + collage H/C (D’un bord à l’autre…), 1990. Sérigraphie et collage sur papier, encadré. 69,3 x 59,3 cm.
— Sérigraphie + collage H/C (Illisible au centre), 1990. Sérigraphie et collage sur papier, encadré. 69,3 x 59,3 cm.
— Sérigraphie + collage H/C (« Spermatozoïdes… »), 1990. Sérigraphie et collage sur papier, encadré. 69,3 x 59,3 cm.
— Sérigraphie + collage H/C (« Mots verrouillés… »), 1990. Sérigraphie et collage sur papier, encadré. 69,3 x 59,3 cm.
Gary Hill
— Happenstance (part one of many parts), 1982 – 83. Vidéo (noir et blanc, son stéréo). 6’30’’.
— Tale Enclosure, 1985. Vidéo (couleur, son stéréo). 5’30’’.
Eduardo Kac
— Reversed Mirror, 1997. Vidéo (noir et blanc, sonore). 7’.