ART | CRITIQUE

Dreamland

PNicolas Villodre
@12 Juil 2008

En 2001, un centre d’art contemporain fut créé dans le domaine de Chamarande couvrant une superficie de 98 hectares doté d’un château du XVIIe siècle. Une collection, «L’Esprit des lieux», a été constituée grâce à un fonds spécifique départemental. «Dreamland» est un choix d’œuvres récemment acquises.

La collection «L’Esprit des lieux» comprend des œuvres de Lilian Bourgeat, Erik Samakh (Flûtes solaires), Miguel Egaña (Feuilles-scies, 2001), Bert Theis (Croix blanches géantes) et Philippe Ramette. Elles sont pour la plupart exposées en permanence dans le parc. La glacière abrite une installation sonore de Céleste Boursier-Mougenot. Par ailleurs, l’orangerie présente des expositions temporaires de jeunes artistes.

«Dreamland» est un choix d’œuvres récemment acquises par le Fonds départemental d’art contemporain de l’Essonne. Celles-ci se présentent sous différentes formes et sur différents supports: photos, vidéos, dessins, sculptures.
Martine Aballéa, Michael Dans, David Évrard, Myriam Mechita, Marylène Negro, Florian et Michael Quistrebert, Bruno Serralongue proposent des paysages ou, du moins, des éléments censés peupler la nature avec, à chaque fois, une altération du modèle d’origine ou une profonde transformation de celui-ci, ce en quoi les points de vue finissent par ressembler à des chimères.

Si le corpus qui forme «L’Esprit des lieux» paraît indiscutable, déjà patiné par le temps (les années et aussi le climat), il n’en est pas de même de toutes les œuvres montrées à l’orangerie. Dans l’ensemble, on  ne peut pas dire qu’elles soient vraiment expérimentales ! On n’en ressent ni la profonde motivation ni même le moindre risque de novation. Comme si l’art s’était figé dans le libéralisme conformiste des années 80.

Bruno Serralongue utilise la photographie. Son Portrait d’Ernesto Guevara, réalisé en 1997, tiré en Ilfochrome et en grand en 2006. Le paysage, urbain, n’a pas de rapport direct avec le thème Dreamland. C’est plutôt le contenu de la photo (le cliché du Che pris par Alberto Korda en 1960) qui, en l’occurrence, se réfère aux espérances du peuple cubain et à celles des utopistes du monde entier. L’enseigne de l’hôtel America, au premier plan, prise par hasard ou non, ajoute un grain d’ironie à l’image.

De Florian et Michael Quistrebert, la nature morte en 3D est une kitscherie présentée comme «installation», portant un titre livré en anglais : If you’re ready, come go with me. On préférera leur travail graphique, les six dessins de loups, à l’encre, aux contours nets et à la ligne claire (Wolf Soul). La présence de la Lune indique qu’on a probablement affaire à des loups-garous. Nous sommes dans l’esthétique BD.

De Myriam Mechita, on a retenu une sculpture en fonte d’aluminium, Chien, datant déjà de 1997, qu’on ne voit pas immédiatement car elle est posée directement au sol. La bestiole a été gelée pour l’éternité, dans une pose familière et paisible, roulée en boule. La pièce n’a rien de morbide.

Martine Aballéa est l’aînée de cette promotion. On lui doit une photo couleur relativement agrandie, représentant, comme son titre Warm Garden l’indique, un jardin aux teintes fauves, pourpres, étrangement étalonnées. Les reflets de l’eau sont diaprés, jaspés.

Marylène Negro projette une vidéo d’une dizaine de minutes intitulée comme un vieux Chabrol, Les Biches. Des animaux qu’on s’attend à voir, comme Godot, mais qui seront déceptifs. Avec simplement une poignée de photogrammes ou d’images fixes, elle obtient des effets anaglyphiques assez intéressants, sur fond musical diffusé plein pot d’une composition à la Bernard Herrmann.

Michael Dans traite lui aussi du grand méchant loup. Mais à sa manière. En très grands formats peints à l’encre de Chine. Ses silhouettes à forme humaine sont d’une rare efficacité. Plastiquement parlant très au point. Absolument convaincantes.

Martine Aballéa
Warm Garden, 2002. Photo couleur tirage numérique, contrecollée sur aluminium. 100 x 150 cm

Michael Dans
— Who Shot Liberty Valance, 2007. Dessin à l’encre de Chine. 270 x 200 cm encadré
— Un très, très, méchant loup, 2006. Encre de chine sur papier, 230 x 150 cm

Marylène Negro
Les Biches, 2006. Diptyque photographies contrecollées sous diasec

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