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Ce recueil de textes critiques de Hans Ulrich Obrist donne un panorama de l’activité prolifique du jeune commissaire d’exposition suisse. On retrouve dans cette édition des articles sur Fischli et Weiss, Anri Sala, Rirkrit Tiravanija, Philippe Parreno, etc.

Information

Présentation
Hans Ulrich Obrist
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Préface de Rem Koolhaas
«Une rumeur veut que Hans Ulrich Obrist ait quitté son pays natal en raison de son débit, trop rapide pour les Suisses. Depuis, cette volubilité est à l’origine d’un extrême niveau de productivité, essentiel à son activité. Les personnes atteintes de logorrhée n’incitent généralement guère les autres à communiquer ; ici, Obrist se hâte au contraire de laisser les autres parler.
Ce texte a commencé comme une courte introduction pour la présentation du premier livre d’entretiens d’Obrist avec «400 penseurs éminents» à la Biennale de Venise 2003. Depuis lors, le rythme de la frénésie productive d’Obrist n’a fait que s’accentuer, en parallèle avec l’accélération constante du monde de l’art.
Le commissariat d’exposition est une profession qui manie l’applaudissement et le blâme, un système de sélection, d’exposition et de jugement. Les commissaires aident de jeunes talents à se lancer, puis renvoient ces mêmes talents dans les cordes dès lors qu’ils ont épuisé notre curiosité. Quand, il y a dix ans, j’ai découvert pour la première fois leur désinvolture touchant la vie et leur routine de la mort, j’ai été choqué par cette véhémence jacobine, étonné par ces certitudes ; les commissaires semblaient les derniers habitants d’un monde en noir et blanc. Hans Ulrich Obrist est un véritable commissaire, participant impliqué dans ce processus — la façon dont ses yeux se perdent dans quelques limbes intérieurs pour suggérer que tel artiste n’est plus viable est inimitable, drôle presque, s’il n’était quelque peu sinistre dans son pur mécanisme éliminatoire…
L’engagement d’Obrist dans ces entretiens représente peut-être sa contre-offensive la plus claire à la mainmise du commissariat d’exposition. Obrist l’interviewer serait-il la face cachée de l’Obrist commissaire ? Là où celui-là serait accommodant, curieux d’explorer l’esprit d’autrui — sans coupe ni purge —, celui-ci serait sélectif et exclusif
Aucune parcelle d’intelligence n’est trop modeste pour échapper à l’attention de Hans Ulrich Obrist. Obrist pose des questions «normales», méticuleusement préparées, avec une insistance telle qu’elles finissent par révéler des recoins insoupçonnés. Car sa connaissance de la vie de ses interlocuteurs dépasse souvent la leur.
C’est l’intérêt omnivore de Hans Ulrich Obrist qui en fait un interviewer inestimable ; son goût pour l’anachronique, l’oublié, le profondément démodé donne à ses entretiens un caractère de justesse, et non de jugement.
L’ensemble des entretiens et écrits d’Obrist représente un effort héroïque pour préserver les traces de la pensée de ces cinquante dernières années, pour faire sens de l’apparemment décousu, une barrière contre l’oubli systématique qui se cache au cÅ“ur de l’âge de l’information, et qui forme d’ailleurs peut-être son projet secret…
Mais au cœur des pratiques d’Obrist — dont celle de commissaire — sont ancrées des méthodes et des formules capables d’enrayer le processus curatorial d’élimination. Obrist a eu la naïveté et l’audace de s’aventurer dans d’autres cultures, tirant parti du manque d’estime de soi culturelle des petites nations, propice au point de vue anthropologique. Nombre de ses expositions se basent, non pas sur la singularité du commissaire, mais sur une autorité diffuse ou multiple, qui s’auto-engendre ou résulte d’«automatismes» et de procédures tendant à éliminer le commissaire au profit d’un processus plus aléatoire ou plus impartial. Certaines expositions d’Obrist laissent tout simplement les choses se faire.
Alors que l’économie du monde de l’art explose, l’idéalisme d’Obrist peut apparaître comme une tentative donquichottesque de modifier la course du géant. Les préfaces d’Obrist — qui sont en fait des séries de minimanifestes imbriqués — résonnent des tentatives passées pour perturber la suffisance du monde de l’art par des retours agit-prop à Dorner ou autres héros de l’instable et de l’inattendu. «Mobile», «inévitablement incomplet», «dynamique», de ses objectifs habituels ressort une vive exigence de radicalisation, au moment même où le système de l’art subit une puissante évolution dans le sens inverse. Son rôle à la fois de critique et d’acteur dans le meilleur des mondes de l’art est un numéro de corde raide, plein de suspense et de ravissement.
Hans Ulrich Obrist, finalement, crée des communautés. Il lie et entrecroise les esprits : chaque exposition, chaque conversation se double d’une spirale de références à d’autres générations et champs de réflexion, à d’autres beautés, compétences, sensibilités et parentés.»

Hans Ulrich Obrist vit et travaille à Londres. Il fonde en 1993 le musée Robert Walser et dirige le programme «Migrateur» au musée d’Art moderne de la Ville de Paris où il est commissaire pour l’art contemporain jusqu’en 2005. Il est aujourd’hui codirecteur des expositions et directeur des projets internationaux de la Serpentine Gallery à Londres. Depuis 1991, il a organisé ou co-organisé de nombreuses expositions individuelles (Olafur Eliasson, Philippe Parreno, Jonas Mekas, Pierre Huyghe, Anri Sala, Doug Aitken…) et collectives (Do it, 1994 ; Cities on the Move, 1997 ; 1e Biennale de Berlin, 1998 ; Mutations, 2000 ; Utopia Station, 2003 ; 9e Biennale d’art contemporain de Lyon, 2007).

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