A l’occasion de l’édition 2017 du festival «L’été danse au CDC», Nans Martin présente sa troisième création, D’œil et d’oubli. Après Parcelles, ce dernier spectacle met en oeuvre trois idées qu’expriment autant de mouvements particuliers : traverser et être traversé ; frapper ; se lever et se tenir debout. D’œil et d’oubli reprend pour partie ces mêmes données chorégraphiques pour tenter de faire le récit d’une absence qui peut déterminer une existence.
D’œil et d’oubli : l’intimité
Pièce pour six interprètes et un compositeur, D’œil et d’oubli prolonge sur scène une succession d’événements personnels ayant marqué l’intimité même de Nans Martin. D’œil et d’oubli s’efforce donc de donner sens et consistance à ce matériau biographique. Comment donner forme à ses souvenirs qui ne sont que sensations fugitives, images évanescentes, ou reconstructions sensibles approximatives d’événements passés ? Comment faire partager au public ces souvenirs individuels dont la nature intime tend à échapper à toute formulation précise ?
Dans D’œil et d’oubli, le corps du danseur se révèle le moyen évident d’exprimer ce passé enfoui que la mémoire individuelle peine à livrer. Peut-être le corps est-il le seul la seule surface d’inscription fiable d’une suite d’événements personnels disparus, que Nans Martin veut restituer sur scène. Leur absence même semble pouvoir être exprimé par le corps dont la sensation est le seul moyen d’expression. Car que peut-il y avoir de plus fiable et juste que ces moments où le corps de chacun fléchit ou se fortifie, se défend ou renonce, symptômes d’une raison aux prises avec le passé ?
D’œil et d’oubli : l’absence
Si D’œil et d’oubli se présente comme le récit d’une existence qui n’est plus présente à elle-même, celle-ci trouve toutefois un point d’appui dans la «mémoire du corps». Le corps sentant met au contact du passé et le prolonge rendant possible la reconstruction rétrospective d’une histoire personnelle. Nans Martin peut alors tenter de retrouver au sein du présent le plus immédiat ces divers instants disparus et «inventer une forme, un espace, une durée» qui puissent manifester sur scène cette absence fondamentale.
 Dans D’œil et d’oubli, Nans Martin incite le spectateur à prêter attention à ces moments apparemment indicibles qu’essaie de retrouver la conscience individuelle, en recourant à des procédés chorégraphiques qui permettent aux spectateurs de changer de point de vue au travers de la seule mise en scène des corps. La chorégraphie D’œil et d’oubli conduit ainsi les spectateurs à se représenter l’absence au coeur de toute existence.