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Dito from Scratch

Ils sont dix, pas moins ! Entre 30 et 35 ans. Formés sur les bancs de trois écoles de design françaises: Les Arts décoratifs de Paris, L’ESAD de Reims et l’Ecole de design Nantes-Atlantique… Les Dito : une pure concentration de sensibilités différentes, qui se retrouvent autour d’un même désir d’innovation et de liberté créatrice – nées de l’émulation du travail en groupe.

En design, l’histoire se répète d’un siècle à l’autre, sans s’écrire pour autant à l’identique. Beaucoup dans le passé ont déjà tenté le pari de la collégialité, du partage des idées et des énergies. En 1929, l’Union des artistes modernes s’émancipaient des carcans de la tradition décorative sous l’initiative de Robert-Mallet Stevens, bientôt rejoint par d’autres, Charlotte Perriand ou Jean Prouvé ; en 1980, le collectif Memphis libéraient les formes, les matériaux et les fonctions, tirant du travail en commun une stimulation et une ouverture créatrices ; au début de la décennie 2000, Front design et ses quatre « drôles de dames » puisaient dans le groupe l’originalité d’une démarche ironique tandis que les 5.5 designers s’en allaient bras dessus-dessous révolutionner la relation entre l’objet et son utilisateur…

Les Dito, eux, poussent le principe un peu plus loin, faisant de la démocratie une condition de travail sine qua non ! Ils vont jusqu’à inventer une méthode au service de cette idéologique : pas de hiérarchie, aucune répartition préalable des tâches mais une mise en commun d’idées, de principes, de références et d’images afin d’élaborer un répertoire de formes au sens large. Ensemble, ils réfléchissent sur les matériaux, la notion d’équilibre ou d’écrasement… et créent des objets insolites, aux noms fictionnels et aux sonorités dépaysantes : Lurha, étagère suspendue, Sutfé, lampe-cloche médusante aux proportions oniriques, Riliz, assise au piètement de textile ( !) ou Molro, meuble multifonctionnel « à croissance illimitée » (pour reprendre l’expression Corbuséenne) conçu au moyen de la juxtaposition d’objets autonomes et inséparables les uns des autres au risque de perdre en tenue et en solidité. Une métaphore du collectif lui-même…

A la base de ce travail: le dessin et la couleur, à la fois outils, matières et modes de communication entre les membres du groupe. Pour preuve, les croquis projetés en introduction de leur (première) exposition au Lieu du design, véritable fenêtre sur le processus créatif et point de départ d’une scénographie voulant éclairer l’originalité de la démarche plus que l’objet fini. A l’image du collectif, elle retrace avant tout une expérience et présente des projets en devenir, valorisant la recherche, la créativité et le lien entre l’objet et son contenant par une remise en contexte systématique.

Une « potentialité » qui déstabilise sans pour autant décevoir, en raison de la qualité des panneaux et des maquettes présentées, du soin apporté à l’organisation de l’espace et surtout de cette occasion (rare) de découvrir une utopie qui se vit et se pratique tous les jours − ou plutôt soirs et week-ends, quand les membres du collectif sont enfin libérés de leurs occupations professionnelles….

Les Dito offrent un aller-simple vers l’imprévu et repensent le mobilier domestique en le dotant d’une plasticité nourrie à la couleur et d’une indétermination fonctionnelle, où l’on croit reconnaître l’influence (assumée ou non) de Pierre Charpin… Et si le manque de praticité de certaines propositions − le faible contenant de l’étagère et de la bibliothèque ou les dimensions encombrantes des objets, mal adaptées aux intérieurs lambda(s) – limite l’évidence d’une édition en l’état, le collectif ouvre un champ des possibles et démontre la portée créative et réflexive de la discipline. Il se pourrait bien que sous l’impulsion de partenaires comme le Lieu du design, prêts à en dévoiler et à en soutenir le talent, le dessein des Dito confirme le titre de l’exposition : « From Scratch »: à partir de rien, de zéro ; soit l’idée qu’il ne s’agit que d’une première étape vers un avenir productif et que la rayure (scratch encore), gagnant en profondeur, finit toujours par menacer le verre dans son intégralité…

Dito
Loutor, 2010. Etagère et miroir fixés au mur. 170 x 288 x 30 cm.
Dito, Lurha, Etagère suspendue. 340 x 310 x 80 cm.
Molro, 2010. Typologies multiples : miroir, porte-manteau, rangement, contenant, boîte, tablette, luminaire. 230 x 195 x 130 cm.
Rokr, 2010. Tablettes. 150 x 190 x 110 cm.
Mawou, 2010. Canapé plateforme. 80 x 330 x 280 cm.
Riliz, 2010. Ilôts à usages divers : table, étagère, assise. 120 x 180 x 110 cm ou 70 x 120 x 90 cm ou 140 x 140 x 140 cm.

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