Bernard Pourrière
Dimensions variables
Dans le cas de certaines sculptures et d’installations sonores, la notion de participation du spectateur est essentielle. Elle prend une autre forme que celle qui lui est généralement attribuée lors de représentations publiques. L’expérience acoustique n’est pas réservée à ceux qui connaissent les instruments. Certains musiciens ou plasticiens, préconisent le recours à des sources ou à des objets sonores des plus diversifiés, qui ne nécessitent aucune pratique préalable.
Space 2007 est un dispositif de capteurs qui balaye un périmètre délimité. Ces capteurs déclenchent des phénomènes acoustiques en fonction des mouvements effectués par la personne qui expérimente l’œuvre. Dans une autre installation de 2007, c’est encore une fois les déplacements du spectateur, lorsqu’il marche ou touche les tapis disposés au sol et sur le mur, qui activent un dispositif constitué d’éléments vidéos et de phénomènes sonores.
Chez Bernard Pourrière, l’équipement technique des installations est souvent présenté comme un générateur de faits visuels et sonores. Les deux aspects de l’œuvre s’unissent dans la perception. Les câbles, les tiges métalliques, les microphones et les haut-parleurs ne sont pas dissimulés, puisqu’ils participent, à leur manière, à cette mise en scène sonore. Il ne faut pas y voir un parti-pris esthétique, mais une condition nécessaire à la mise en Å“uvre d’un processus, avec les multiples aléas que cela suppose.
Pour l’artiste, le dispositif électro-acoustique représente un pôle d’intérêt visuel à part entière. Il permet à l’auditeur/spectateur de comprendre de quelle manière les sources sonores peuvent être manipulées en temps réel. Il devient, pour un temps défini, un acteur invité à faire corps avec l’outil technologique.
Très souvent, les installations de Bernard Pourrière se présentent sous la forme d’expériences individuelles. Comme dans Gym, où un spectateur couché sur un tapis de caoutchouc, les genoux pliés, déplace avec ses pieds un haut-parleur équipé d’un capteur et modifie le son émis. Mais, il peut également arriver que plusieurs personnes conjuguent leurs actions, un peu comme s’il s’agissait d’un petit orchestre de musique de chambre.Par exemple, dans une installation datant de 2009, les mouvements et les déplacements de trois personnes modifient le son en temps réel, tandis qu’un quatrième participant combine leurs interventions au moyen d’un ordinateur.
La majorité des installations reposent sur des gestes simples: tourner sur soi-même, se balancer, être en équilibre, bouger les pieds, remuer les mains, le tout de façon plus ou moins maîtrisée. Chacune des œuvres est centrée sur une action unique, comme s’il s’agissait d’un solo, ou même d’un duo entre le corps et l’équipement technique. Certaines peuvent donner lieu à une situation où le performeur doit gérer le résultat sonore tout en assumant la difficulté de se déplacer.
«L’aléatoire est une partie importante de mon travail aussi bien dans la manipulation des fragments sonores que peuvent générer les spectateurs par leurs déplacements, que par des combinaisons que je propose dans mes performances où peut s’instaurer un jeu entre quelque chose de plus calculé (pouvant s’apparenter à une partition) et quelque chose de plus expérimental. Ce côté expérimental est aussi important dans le sens où j’essaye de mettre le corps en difficulté dans ces mouvements et ces gestes, le rapport du corps à l’outil technologique, et où le corps peut devenir un outil de composition, surtout quand je travaille avec plusieurs personnes en même temps». Bernard Pourrière