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Didier Dessus

Une peinture oscillant entre cultures savantes et populaires, mélangeant les genres figuratifs (nature morte, peinture d’histoire) sans renier l’abstraction. Ainsi, Didier Dessus peint-il sur des aplats monochromatiques, des lignes fluides et longilignes aux formes animales (les «Biches»), des figurines (soldats, indiens…), du papier peint d’histoires...

— Auteurs : Philippe Cyroulnik, Jean-Philippe Vienne
— Éditeurs : Le 19, Montbéliard / École nationale supérieure d’Art ; Musée archéologique ; Frac Bourgogne, Dijon
— Année : 2005
— Format : 17 x 24 cm
— Illustrations : nombreuses, en couleurs et en noir et blanc
— Pages : 160
— Langues : français, anglais
— ISBN : 2-35075-001-9
— Prix : 20 €

Les figures de biches
par Didier Dessus (extrait, in Cahiers du 19)

À la surface de mes peintures récentes, les figures de biches (c’est le nom que je leur donne) ne représentent pas un animal particulier directement identifiable, les figures ont des positions plus que des attitudes. Les étirements et déformations des membres des animaux apparaissent comme des ombres projetées et déformées par anamorphose, les positions sont en réalité élaborées dans une phase de dessins, mais cette fois-ci sans déformation, au moment du report des figures à l’échelle de la toile. […] La monochromie noire des biches est pour moi une façon de rappeler l’ombre, les figures évoluent dans un espace sans profondeur dont la pesanteur est absente, elles laissent percevoir les couleurs des fonds sur lesquels elles semblent glisser. Le mode de peinture que j’ai choisi apporte pourtant aux dessins d’origine un volume, un grain, une matière qui leur donne une consistance picturale. Les mouvements de sauts, de courses et de danses mettent les biches du côté de la vie et de l’énergie vitale alors que leur transparence les met du côté des ombres et des spectres impalpables, des fantômes et des fantasmes. Les biches sous formes de silhouettes et de découpes ont toujours été pour moi des «revenantes», des figures qui s’originent par le sujet dans l’art pariétal, mais qui, par la technique du contour, rappellent le récit mythique des origines de la peinture raconté par Pline, récit dans lequel l’invention de la peinture naît du report par une jeune fille d’une ombre portée sur un mur.

[…] Mes toiles récentes mettent en scène la rencontre de deux mondes antagonistes : celui des fonds colorés statiques peints en aplats d’une part, et, d’autre part, celui tout en courbes biomorphiques et dynamiques des animaux noirs dansants. La peinture géométrique, avec la connotation de pureté qui lui est associée (suppression du sujet, de l’illusion des corps et des objets), est réemployée comme «toile de fond» pour un resurgissement trivial, les compositions évoquent les motifs à bandes de toiles de matelas ou de serviettes tout en faisant référence sur un mode mineur au hard edge de la peinture américaine. La rencontre des deux modes picturaux animal-dynamique / géométrique-statique produit un télescopage formel et temporel, une sorte de clash plastique et historique. J’utilise ces formes comme les personnages d’un drame historique pictural qui se déroule au temps présent et dont l’un des stades antérieurs a été une phase de réduction formelle et de purification forcée. Le moment que je présente est celui du retour des figures des origines devenues spectrales mais restées (je l’espère) sensuelles.

(Texte publié avec l’aimable autorisation du 19 — Tous droits réservés)

L’artiste
Didier Dessus est né en 1962 à Dijon, où il vit et travaille.

Les auteurs
Philippe Cyroulnik est directeur du 19, centre régional d’art contemporain de Montbéliard.
Jean-Philippe Vienne est directeur de l’école nationale supérieure d’Art de Dijon.

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