Communiqué de presse
Frédéric Coché, Richard Müller, Jacqueline Taïb
Dessins
Jacqueline Taïb commence ses toiles par des relevés photographiques. Elle n ’y cherche pas une image, ni un élément pittoresque, à peine quelques indices de lignes, de plans, de perspectives ; quelques zones de couleur y apparaissent, ainsi qu’une orientation virtuelle de l’espace. Plus qu’une représentation du réel, la photographie en est un premier filtre, y faisant émerger des éléments de picturalité.
Loin de dissoudre l’espace pictural, la photographie, ici, le fait apparaître. Comme aurait pu le faire une esquisse, cherchant dans le réel les possibilités de peinture.
Se révèlent aussi, dans cet usage minimal de la photographie, des virtualités de l’espace urbain : Non pas des bâtiments, des voies de communication, des architectures plus ou moins monumentalisées, du mobilier urbain’,…’mais un ensemble de plans, de pleins de vides, de points colorés, de directions et de dimensions dans lesquels s’enfonce et s’aventure le regard du peintre. Le cadrage neutre, hasardeux et pourtant précis de la photographie a défait la scène urbaine ; le travail pictural défait la représentation close de la photographie, lui substituant un espace mental comme espace labyrinthique. Plutôt que des arêtes, des contours, des signaux, le tableau emboîte les pans, fond les couleurs, laisse l’œil se perdre dans l’enchevêtrement des espaces. Ce qu’un premier regard pouvait prendre pour des repères, perd son évidence et finit par participer de l’étrangeté de ce réel.
Le point de départ de la création artistique de Richard Müller consiste en des impressions et des images de paysages concrets et de lieux à caractère de paysage à partir desquels il crée de nouvelles images par des processus de transformation multiples. Les transformations se produisent lors des passages d’un médium d’image à l’autre – une carte postale devient photo, la photo devient dessin, le dessin devient installation, ou bien : une vidéo devient photo extraite de la vidéo, qui devient dessin, le dessin devient image murale – tout comme dans le « jeu » ciblé avec les règles de l’image et les caractéristiques des différents médias.
Dans ses travaux à ce jour, Richard Müller a développé une stratégie artistique de la transformation et de la variation qui l’a conduit à un langage imagier qui lui est propre. Il est intéressant de voir à quel point les « images de départ » concrètes restent importantes et actives tout au long du processus.
Frédéric Coché déclare: «le dessin, la peinture, l’image en général est une re-formulation constante. On dessine avec sa mémoire. On dessine, ou on peint toujours avec une ou plusieurs images sur lesquelles on s’appuie, qui nous inspirent, avec une conscience plus ou moins nette de ce phénomène. Je reproduis une image que j’ai en mémoire. Il ne s’agit pas d’une reproduction mécanique : c’est celle d’une idée, d’une pensée, et cela est comme une reproduction sexuée. C’est à dire qu’elle n’est jamais à l’identique. Comme un enfant est différent de ces parents. Mais la généalogie des œuvres d’art n’est pas celle des humains. Leur durée de vie peut être énorme. Tant qu’elles sont visibles, elles influencent nos pensées, et donc, les fécondent.
Si je veux copier une peinture de Vermeer, toutes les images que j’ai vues, et qui donc sont en moi se manifestent aussi. Elles influencent mes gestes. Je ne peux pas peindre comme Vermeer, car j’ai vu Monet, Picasso, Gasiorowsky. C’est pour cela que l’on peint encore, bien après Giotto, et Van Eyck.»Â