Robert Delpire
Delpire & Cie
Présentée dans l’ensemble des espaces de la Mep, la rétrospective consacrée à Robert Delpire, témoigne du rôle de ce découvreur et promoteur d’images dans la mise en valeur et la reconnaissance de la photographie au cours des dernières décennies. Organisée en huit espaces, l’exposition rassemble environ 500 photographies (tirages originaux, agrandissements, reproductions…) et 150 documents originaux (livres, revues, catalogues).
Pionnier dans l’édition photographique, il publie dès le début des années cinquante les oeuvres de Lartigue, Brassaï, Doisneau, Cartier-Bresson et Robert Frank. Directeur artistique de la revue L’Oeil de 1955 à 1962 (dont il a trouvé le titre) ; responsable d’une galerie où sont exposés les grands noms de la photographie et du graphisme à partir de 1963 ; créateur d’une agence de publicité ; producteur de films ; commissaire d’expositions en France et à l’étranger, il est directeur du Centre national de la photographie (Cnp) à partir de 1982. Il y crée et publie la collection «Photo-Poche», et organise quelque 150 expositions au Palais de Tokyo.
Alors étudiant en médecine, Robert Delpire se lance dans l’édition à 23 ans, avec la revue Neuf (premier numéro en 1950). D’abord destinée aux médecins, la revue, sous sa direction, devient rapidement une revue artistique ; il y publie notamment Robert Doisneau, Breton, Capa, Picasso, Sartre, et Henri Cartier-Bresson. «On dit quelquefois que j’ai découvert Cartier-Bresson. Surtout pas. Il avait déjà publié. Je suis allé vers lui, on a tout de suite sympathisé, il est resté un de mes grands amis. J’ai fait pour lui toutes les expositions que je pouvais faire, je ne sais plus combien, et publié une quinzaine de ses livres».
Premier titre de la collection créée par Robert Delpire et publiée par le Centre national de la photographie en 1982. Suite à un numéro spécial sur Brassai paru dans Neuf, il publie une monographie sur cet artiste, suivie d’une autre sur Werner Bischof, et en 1958, il est le premier à publier le mythique «Les Américains» du photographe suisse Robert Frank. «Le travail de l’éditeur, c’est de valoriser le travail des autres,» dit Robert Delpire, «un travail non seulement d’équipe, mais de connivence. Je n’ai jamais publié quelqu’un qui ne m’intéressait pas».
Il publie une série des monographies importantes, dont Tokyo de William Klein et Exils de Josef Koudelka, ainsi que Carnets de route de Werner Bishof ou la collection «Maestro», dont les célèbres Henri Cartier-Bresson Photographe ou Etienne-Jules Marey Chronophotographe. Robert Delpire a produit également un certain nombre de films dont Qui êtes-vous Polly Magoo, de William Klein, prix Jean Vigo en 1967: «pas de plan de carrière, juste des coups de coeur», raconte-t-il. Parallèlement, pour aider au financement de ses projets, Robert Delpire crée une agence de publicité qui comptera jusqu’à 140 employés, et qui, pendant quinze ans, réalise des campagnes célèbres comme celle de Sarah Moon pour Cacharel, ou celles pour Citroën et L’Oréal.
Après la vente de son agence, il ouvre Idéodis, studio de création et édition. Ce studio est toujours en activité, et Robert Delpire, à 83 ans, y poursuit son travail d’éditeur, de commissaire d’expositions, et de producteur de films. Cet infatigable amateur d’images est aussi à l’origine du renouvellement graphique et thématique de l’album pour enfants. Premier éditeur français de Max et les Maximonstres de Maurice Sendak en 1967, il invente en quelques titres, à travers les collections «Dix sur dix», «Actibom» et «Multibom», une nouvelle manière de concevoir la culture visuelle de l’enfance.
Robert Delpire a également fait des contributions importantes à la photographie sociale, avec le supplément photo créé pour Le Nouvel Observateur dans les années 80. En 1981, Jack Lang, devenu ministre de la culture, souhaite offrir à la photographie des structures jusque-là inexistantes. Il crée en 1982 le Centre national de la Photographie (Cnp) et nomme Robert Delpire à sa tête, un poste qu’il occupera pendant quinze ans. Ce seront des expositions dans l’enceinte monumentale du Palais de Tokyo et surtout le lancement d’une collection, «Photo Poche», petits livres noirs accessibles au grand public, qui compte aujourd’hui 150 titres. Avec les artistes classiques, historiques et incontournables, la collection constitue une sorte d’encyclopédie de la photographie où se croisent Cartier-Bresson, Araki, Nadar et Marey. Aujourd’hui, cette collection se complète avec la collection «Poche illustrateur». Selon Robert Delpire, «les illustrateurs sont tout aussi importants que les photographes dans l’évolution de l’art visuel».