Lieu
Grand Palais
Communiqué de presse
L’intitulé de l’invitation du commissaire d’exposition Hou Hanru «Pour un avenir incertain», qui prend acte de la crispation française actuelle, notamment dans le champ de la culture (dont l’exposition «La Force de l’Art» et les remous qu’elle suscite sont une des manifestations), nous a décidés à établir un espace de débat au Grand Palais: «Nouvelles Urbanités, Cultures et Périphéries».
Cette problématique accompagne la présentation du projet «Je & Nous» dans le quartier des Beaudottes à Sevran. Si l’invitation de Hou Hanru décentre l’exposition en l’ouvrant à des expérimentations en France, à l’étranger ou encore à des collectifs d’artistes travaillant en périphérie, nous avons décidé de répondre à son invitation par une double stratégie d’infiltration et de déplacement.
Malgré l’aveuglement ou le mépris, c’est dans les périphéries que s’expérimente la généralisation de l’urbain de demain; certains nouveaux phénomènes y sont observés et théorisés. La question des centralités n’a plus forcément de pertinence si ce n’est celle de nous inviter à penser ce continuel déplacement des points de vue, des espaces; où le centre et la marge peuvent sans cesse être redéfinis dans ce mouvement, qu’il soit géographique ou pas.
Campement Urbain s’est donc saisi de l’invitation au Grand Palais, gageant que le champ de l’art reste un lieu d’expérimentations, de croisement des pratiques et de débats, n’en déplaise aux partisans de l’entre soi, pour qui la situation d’enclave semble garante du statut de leur pratique. Cette situation de l’art est définitivement critique.
Par ailleurs, il était impossible de participer à un tel événement sans se positionner par rapport à l’actualité récente, et de rester à l’écart des processus de précarisation, de paupérisation, et de relégation qui affectent des parts de plus en plus importantes du monde environnant.
Nous avons donc lancé un appel via nos mails le 15 avril 2006, devenu ainsi le premier espace d’infiltration de ces problématiques « non-invitéés ». Certains ont pris le parti du retrait, d’autres ont au contraire vu dans ce contexte politique la nécessité d’un engagement clair et effectif.
Voilà pourquoi les interventions auront non seulement trait aux problématiques des nouvelles urbanités, des cultures et des périphéries mais seront aussi une forme de réponse à la question: faut-il encore prendre la parole? où, pourquoi et comment…
Programme
—13h
> La survie (débat).
Avec Stéphane Gatignon, maire de Sevran; Adjoints au maire, Bureau municipal de la ville de Sevran et Michel Agier, ethnologue.
Certaines villes de la périphérie rencontrent de très graves difficultés économiques. À Sevran, il n’y a presque plus d’entreprises implantées sur le territoire (Kodak est parti en laissant des terres polluées), 17% de la population est au chômage, et un très grand nombre d’habitants issus de l’immigration vivent dans la pauvreté. Comment construire la suite? Faut-il entrevoir dans cette situation de survie, au-delà de celle qui touche ces espaces de périphérie, les prémisses de crises à venir? Faut-il redéfinir le travail, le salariat, le collectif, l’intégration, la ville?
— 15h
> Comment filmer la Justice ? (Débat)
Avec Maurice Zavarro, magistrat, Annick Peigne Giuly, journaliste spécialiste des médias et Pierre Oscar Levy, cinéaste.
Pourquoi filmer la justice? Pour qui filmer la justice? Qui doit filmer la justice? Qui peut filmer la justice? La justice est-elle un sujet d’images? Voir le film de la justice, est-ce voir la justice? Comment juger un film sur la justice? Comment juger la justice grâce au film?
— 17h
> Hors-Sujet / Démocratie de voisinage (Intervention)
Avec Eric Corne.
Avec la présentation de vidéos de Zoran Naskovski et Vladimir Nikolic. Pendant quelques semaines d’octobre et novembre 2005, les banlieues ont brûlé. Pas toutes, seulement celles situées au nord et à l’est des grandes villes, le couvre feu martial s’est alors imposé puis sont venues pour résoudre cette crise les éternelles vacuités de l’ordre hiérarchique français: la formation d’élite et d’apprentis de 14 ans.
Cette crise n’a pas permis de penser le chaos-monde (Edouard Glissant) avec l’intrication-répulsion des cultures et de leurs différentes temporalités. Tout projet politique, mais aussi toute aventure individuelle ne se font pourtant que dans et à travers la crise. Crise-création qui permet de devenir autre et de travailler la dialectique de l’espace intime et de l’espace public.
À aucun moment la question de leur désir de vivre ne s’est posée face à cette auto-destruction que se sont imposés ainsi qu’à leurs proches, les jeunes des cités. L’autodestruction est toujours narcissique, Narcisse éprouve la douleur et se tue, sourd et aveugle à lui-même, il ne se reconnaît pas. Comme eux dans ces banlieues, car sous la confortable couverture médiatique de racaille, d’intégrisme, de communautarisme ou de passivité, rien ne leur est transmis.
Le monde se transforme, la globalisation maquille chacun de nos gestes, mais le conservatisme frileux et catégorique des élites est là comme dernier et pitoyable rempart soliloquant: pourvu que rien ne bouge. Ces violences portent en elles l’indice de la précarité. Equilibres tendus en passerelles incommodes, l’espace construit des banlieues s’est révélé avec sa ruine imminente et son terrain vague du sensible. Protubérance sauvage, ces cités résistent à la salubrité industrielle et consumériste et déclinent l’espace contemporain.
Infos pratiques
> Lieu
Nef du Grand Palais — Stand Campement urbain
> Horaire
13h-18h30
> Contact
atournon_cu@yahoo.fr
campementurbain.org
> Entrée libre
Tous les samedis, jusqu’au 17 juin.