ART

[Débats] Campement urbain : Nouvelles Urbanités, Cultures et Périphéries

20 Mai - 20 Mai 2006

Dans le cadre de l’exposition «La Force de l’art», au Grand Palais, le collectif «Campement urbain» (Sylvie Blocher, François Daune, Josette Faidit) transforme le stand en espace de paroles: débats, interrogations, expérimentations...

Lieu
Grand Palais

Communiqué de presse
L’intitulé de l’invitation du commissaire d’exposition Hou Hanru «Pour un avenir incertain», qui prend acte de la crispation française actuelle, notamment dans le champ de la culture (dont l’exposition «La Force de l’Art» et les remous qu’elle suscite sont une des manifestations), nous a décidés à établir un espace de débat au Grand Palais: «Nouvelles Urbanités, Cultures et Périphéries».

Cette problématique accompagne la présentation du projet «Je & Nous» dans le quartier des Beaudottes à Sevran. Si l’invitation de Hou Hanru décentre l’exposition en l’ouvrant à des expérimentations en France, à l’étranger ou encore à des collectifs d’artistes travaillant en périphérie, nous avons décidé de répondre à son invitation par une double stratégie d’infiltration et de déplacement.

Malgré l’aveuglement ou le mépris, c’est dans les périphéries que s’expérimente la généralisation de l’urbain de demain; certains nouveaux phénomènes y sont observés et théorisés. La question des centralités n’a plus forcément de pertinence si ce n’est celle de nous inviter à penser ce continuel déplacement des points de vue, des espaces; où le centre et la marge peuvent sans cesse être redéfinis dans ce mouvement, qu’il soit géographique ou pas.

Campement Urbain s’est donc saisi de l’invitation au Grand Palais, gageant que le champ de l’art reste un lieu d’expérimentations, de croisement des pratiques et de débats, n’en déplaise aux partisans de l’entre soi, pour qui la situation d’enclave semble garante du statut de leur pratique. Cette situation de l’art est définitivement critique.

Par ailleurs, il était impossible de participer à un tel événement sans se positionner par rapport à l’actualité récente, et de rester à l’écart des processus de précarisation, de paupérisation, et de relégation qui affectent des parts de plus en plus importantes du monde environnant.

Nous avons donc lancé un appel via nos mails le 15 avril 2006, devenu ainsi le premier espace d’infiltration de ces problématiques « non-invitéés ». Certains ont pris le parti du retrait, d’autres ont au contraire vu dans ce contexte politique la nécessité d’un engagement clair et effectif.

Voilà pourquoi les interventions auront non seulement trait aux problématiques des nouvelles urbanités, des cultures et des périphéries mais seront aussi une forme de réponse à la question: faut-il encore prendre la parole? où, pourquoi et comment…

Programme
—13h30
> La «force» de l’ «art» : puissance ou pouvoir ? (débat)<
Par Stephen Wright.
Avec Alexandre Gurita.

Parce qu’on nous dit que la «force» de l’«art» est plus qu’une exposition, un «événement», on peut se demander quel sens a un titre si affirmatif et si volontariste. De quelle «force» s’agit-il? Et de quel «art»? Que cherche-t-on à mettre en avant?:

— une puissance subversive de l’art qui lui garantirait toujours, même dans un contexte politique très chargé, une certaine liberté?

— une position qui chercherait à masquer un cynisme qui ne croit plus du tout à l’art, pour lequel l’art n’aurait plus comme fonction que celle de soutenir un pouvoir hypocrite et profondément désengagé, notamment auprès des artistes ?

—15h
> L’incertain (Intervention)
Par Françoise Collin.

«L’incertain», proposé il y a quelques jours à ma réflexion par Sylvie Blocher y fait écho. C’est quand rien n’est garanti que le commencement est possible. C’est dans l’impossible et sur fond d’impossible que se dessine le possible. L’incertain appelle l’initiative là où le certain se tient dans l’immobilité, fermé au nouveau, rend superflu. Là où tout est dit, je n’aurais au mieux qu’à le redire. Par le certain je suis déjà congédié(e). Rassuré(e) peut-être mais congédié(e).

Mais n’y a t il pas quelque chose de sacrilège à faire l’éloge de l’incertain quand la précarité (sociale) est une menace? C’est une vraie question. On peut y répondre en distinguant le niveau du socio-économique où devrait régner le certain, du niveau symbolique où serait requis l’incertain de l’imaginaire, mais cette division n’est pas évidente: le risque et la rente ne se distinguent et ne se conjuguent pas aussi simplement. Il faut plutôt penser que l’incertain ne peut être érigé en système social : il a rapport à l’initiative du sujet singulier, non à la contrainte. Ce n’est pas un état mais un risque pris.

Ecrire/agir: ces deux mouvements apparemment si différents exigent un même rapport à l’incertain comme à ce qui n’est pas encore. L’incertain se surmonte dans le moment de l’affirmation mais il demeure dans l’affirmation même comme ce dont elle vit, sur quoi elle veille. L’affirmation ne tire sa splendeur que de son trouble — son aura – là où le réel n’est pas encore tracé, où l’être est à être. Le trouble accompagne la décision et y persiste. Le «je ne sais pas» ébranle et soutient tout à la fois le «je sais» de l’œuvre. Il faut relire Descartes en le dédoublant : «je pense donc je suis» et «je pense donc je ne suis pas ».

Il faut pour créer, et simplement pour être, pour continuer à être, se fier à ce qui est sans garantie: ne pas savoir pour savoir quelque chose, un simple «ceci». Avoir rapport à l’incertain, c’est ne pas cesser de le fuir et de le retrouver: saisir l’avenir comme ce qui est toujours à venir, c’est à dire sans garantie.

Ecrire (créer) et agir ne sont pas sans rapports de ce point de vue: mouvements ébauchés dans l’incertitude de leur fin, mouvements sans représentation de ce qu’ils visent, expérience des commencements : l’être est « naissanciel » (Hannah Arendt). L’écriture et le politique ont ceci en commun qu’ils se nourrissent de l’ irreprésentable : finalités sans fin et sans modèle.

Qui commence une phrase, qui en prononce les premiers mots ne sait pas où ceux-ci le conduiront ,où il ira. Il commence cependant, se fiant au dire, sans être assuré de ce qu’il dira, marchant sur le vide. Et il dit toujours plus ou moins autre chose que ce qu’il croyait: les mots qu’il/elle possédait avec assurance conduisent ailleurs qu’à leur destination initiale. Ils précèdent le sens, engendrent le sens. Le livre est toujours « à venir » (Maurice Blanchot).

Et l’à venir n’est pas nécessairement un avenir: l’incertain a partie liée au risque, à la perte. Le naissanciel est aussi mortel.

— 15h30
> Biennale de l’Urgence en Tchétchénie
Par Evelyne Jouanno.

Point sur les différents développements du projet lancé le 23 février 2005 à Paris et Grozny, au moyen de valises et grâce à la générosité de plus de 60 artistes du monde entier.

En présence d’Evelyne Jouanno, directrice du projet, des artistes français participants : Adel Abdessemed, Maja Bajevic, Ruth Barabash, Sylvie Blocher, Anton Kozlov, Marc Boucherot, Mathieu Briand, Santiago Caicedo, Magali Claude, Seamus Farrell, Adriana Garcia Galand, Ghazel, Yves Grenet, Han Myung-Ok, Kolkoz, Koo Jeong-A, Lucy Orta, Emmanuelle Rapin, Sarkis, Shen Yuan, Pascale Marthine Tayou, Wang Du, Florence Wang, Yang Jie Chang (à confirmer pour certains), de la FIDH (Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme), marraine du projet, et de deux étudiantes Tchétchènes , Svetlana et Milana.
www.emergency-biennale.org

Infos pratiques
> Lieu
Nef du Grand Palais
> Horaire
13h-18h30
> Contact
atournon_cu@yahoo.fr
campementurbain.org
> Entrée libre
Tous les samedis, jusqu’au 17 juin.

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